par Camille Gontier
Sol 1. Les choses sérieuses ont commencé aujourd’hui. La journée a commencé avec une séance d’exercice physique collectif, puis l’emploi du temps de la journée a été revu et validé par tout l’équipage durant le petit déjeuner. Nous avons tous commencé à travailler sur nos expériences: l’assemblage et intégration du Véhicule de Reconnaissance de Paroi a été effectué durant l’après midi pour un premier essai visé durant la sortie EVA de demain. De la même manière le système d’électrocardiogramme, celui de mesures intégré en EVA et les lunettes connectées EMUI sont maintenant prêts pour les premiers essais opérationnels. Pour la première fois (mais sûrement pas la dernière), j’ai du contacter la Terre pour des clarifications sur le software d’analyse de l’électrocardiogramme, car le manuel d’utilisation n’était pas disponible hors ligne et que j’avais oublié de le télécharger. « Les grandes déroutes sont logistiques »: c’est seulement quand vous réalisez à quel point cette sentence est vraie que vous savez que la mission a réellement démarré et que vous êtes maintenant laissés seuls sur Mars.
Mais d’abord, la première sortie EVA de la mission a eu lieu ce matin. Nous avons conduit une préparation aussi solennelle que possible, et je ne pense pas qu’un scaphandre Orlan aurait été porté par un cosmonaute en LEO avec plus d’application et fierté que les nôtres.
La première sortie EVA sur les contreforts du Hab Ridge. Les installations MDRS sont visibles à droite. Au loin, les Henry’s Mountains, à 35 km de distance s’élèvent à 3500 m. Elles sont parfois désignées « Olympus Mons » par les équipages de simulation. L’EVA 1 a été conduite par Mehdi Scoubeau, Louis Maller et Arthur Lillo. (Doc MDRS 164)
Pendant deux heures le Hab est devenu étrangement silencieux, et nous étions seulement entourés du ronronnement léger de la pompe à eau, le souffle continu de la ventilation, les bips timides émanant de nos électroniques, et de temps en temps, le voix électronique du leader d’EVA, arrivant atténuée quelque part d’un walkie talkie, suivie par le bip du signal de communication. A partir de maintenant je pense que ce sera l’ambiance sonore de notre mission. Un étrange mélange de bande son technologique et de bruits de vie d’astronautes. La rencontre entre la science et la vie.
Les électrodes du dispositif d’électrocardiogramme (doc. MDRS 164)
Au rez de chaussée du Hab, Mohammad Iranmanesh procède à l’assemblage du Véhicule de Reconnaissance de Paroi de l’association Planète Mars (doc. MDRS 164)
A la fin de la journée, un autre son a fait son apparition: le vent sifflant bruyamment et claquant sur le Hab, nous rappelant à quel point la station est en fait fragile devant la furie des éléments. Etre ainsi protégé de cette tempête martienne, et ressentir les craquements du toit du Hab sous le vent, m’a donné la sensation d’être isolé dans une tente de bivouac dans le désert au milieu d’une tempête. C’est ainsi que Joseph Kessel décrit Antoine de Saint Exupéry travaillant sur ses premiers romans dans « Mermoz »: En tant qu’ingénieur, l’homme, isolé dans sa tente dans le Sahara, écrivait ainsi le soir tout ce qu’l avait pensé de son avion dans la journée. Et, particulièrement, il nous racontait la rencontre entre un pilote professionnel et un petit garçon rêveur. Et je ne pense pas qu’être astronaute soit vraiment différent que d’utiliser la science pour répondre aux rêves d’enfants, leurs regards perdus dans les étoiles.
Le Hab Ridge à gauche et l’observatoire astronomique à droite vus depuis le premier étage du Hab (doc. MDRS 164)
Les autres rapports du jour, en anglais, sont disponibles ci dessous:
16 02 22 engineering report 164
Voir également pour la journée du 22 février l’article ADN.
L’équipage et les expériences prévues lors de la mission sont présentés ici