Par le Dr Robert Zubrin, SpaceNews, 21/12/11 (traduction Pierre Brisson)
La direction des finances de la Maison Blanche (« Office of Management and Budget », OMB) a fait disparaitre des documents budgétaires, l’engagement américain de participer aux missions conjointes avec l’Europe (ExoMars) qui devaient être lancées vers Mars en 2016 et 2018. Cela créé une crise grave pour tous ceux (dont nous sommes) qui espèrent un avenir dans l’Espace pour l’Homme.
Le programme d’exploration de Mars par la NASA a été brillamment couronné de succès parce que, depuis 1994, il a été abordé comme une campagne cohérente et structurée, avec des lancements de sondes lors de chaque opportunité biennale, faisant alterner des orbiteurs et des atterrisseurs. Il en est résulté la possibilité de monter des opérations combinées, les orbiteurs fournissant des liens de communication et des relais d’instructions d’exploration aux rovers de surface, qui à leur tour peuvent mener des recherches sur le terrain en fonction d’observations faites à partir d’orbites martiennes. Ainsi les remarquables treks des rovers Spirit et Opportunity, lancés en 2003, ont été appuyés d’en haut par Mars Global Surveyor (MGS, lancé en 1996), Mars Odyssey (lancé en 2001), Mars Express (lancé en 2003), Mars Reconnaissance Orbiter (MRO, lancé en 2005). Mais après avoir servi 10 années sur orbite, MSG est maintenant hors d’usage et, si nous attendons jusqu’aux années 2020 pour reprendre l’exploration de Mars, les autre orbiteurs seront également hors service. De plus, il en sera de même pour les équipes expérimentées qui les ont créés. En fait l’ensemble du programme sera complètement détruit et nous devrons repartir, à nouveau, de zéro.
Par ailleurs, si on laisse l’OMB faire les coupes qu’elle envisage,on va non seulement détruire le programme d’exploration martien de l’Amérique, mais on va faire échouer celui de nos alliés européens. Les missions 2016 et 2018 ont été conçues comme un projet conjoint de la NASA et de l’Agence spatiale européenne, les Européens y contribuant pour plus de 1 milliard de dollars. Si l’Amérique revient sur son engagement, les partisans européens de l’exploration de Mars se retrouveront sans parachute en plein ciel et les deux missions ainsi que le partenariat seront perdus.
Le programme de vols habités de l’Amérique est complètement à la dérive. A moins qu’il ne soit restructuré en une directive axée sur une mission déterminée pour atteindre efficacement des objectifs importants dans un délai significatif, il pourrait bien s’avérer indéfendable dans le contexte du tsunami financier à venir. Mais le programme martien est défendable. Ses objectifs sont réels et rationnels, ses coûts sont raisonnables et son « track record » est un formidable catalogue de succès. Il peut et doit être sauvé.
Les coupes proposées n’ont aucune justification. Le gouvernement américain peut être en train de faire faillite mais ce n’est pas à cause de la NASA. Depuis 2008, les dépenses fédérales ont augmenté de 40 pour cent tandis que les dépenses de la NASA n’ont augmenté que de 5 pour cent. On ne peut remédier à des trillions de dollars de dépenses hors de contrôle, par de simples coupes dans le budget de la NASA, ou même dans l’ensemble du budget « discrétionnaire », inclus celui de la Défense. Au contraire, l’hémorragie financière doit être jugulée là où se situe le trou, nulle part ailleurs.
En tout cas, le coût n’est pas la question. En parallèle avec le financement des Européens, une contribution équivalente de la NASA de 1 milliard de dollars, répartie sur les six prochaines années, serait suffisante pour financer à la fois les missions 2016 et 2018 à hauteur de 1 milliard de dollars chacune. Cela nécessiterait moins de 1 pour cent du budget actuel de la NASA. Il n’y a aucune excuse pour ne pas le faire.
Dans la perspective actuelle, le programme martien ne serait pas abandonné au profit de futures missions vers d’autres planètes. En fait, dans le plan de l’OMB il n’y aurait pas d’argent pour financer quelque projet alternatif que ce soit.
Le programme d’exploration planétaire de l’Amérique est l’un des grands chapitres de l’histoire de la science, de la civilisation et de notre pays. Son abandon ne représenterait rien moins qu’un enfoncement dans le déclin américain. Cette perspective est inacceptable.
Mars est essentiel pour l’avenir de l’humanité dans l’Espace. C’est la planète la plus proche,celle qui a toutes les ressources nécessaires pour permettre la vie et l’épanouissement d’une civilisation technologique. Sa complexité exige absolument les compétences d’explorateurs humains et ce sont eux qui ouvriront la voie à des colons humains. C’est, par conséquent, l’objectif le plus approprié du programme de vols habités de la NASA et la priorité la plus appropriée pour ses missions robotisés légères (« scout »). Le programme de vols habités peut être en pleine déliquescence mais les missions robotisées légères nous ont fait progresser et, sans aucun doute le pourraient encore davantage, si seulement nous les poursuivions.
Si nous permettons à l’OMB de mettre fin à l’effort d’exploration de Mars, la NASA perdra son projet le plus concret et qui a le plus de retombées, l’un des rares qui donnent les résultats qui justifient le programme spatial entier comme une entreprise d’envergure nationale. La nation va perdre un de ses joyaux de la couronne; les scientifiques vont perdre leur chance de trouver la vie au-delà de la Terre et l’humanité perdra la seule entreprise significative réalisant des progrès réels et visibles vers l’ouverture de la « frontier » sur un autre monde. On ne peut pas laisser cela se produire.
C’est ici que nous devons nous arrêter et résister. Il n’y a aucune excuse pour démolir le programme martien. Le pays ne peut se le permettre et laisser tomber signifierait tourner le dos à nos alliés, à la science, à la grandeur, à l’esprit pionnier et à notre avenir. Tout le monde doit se mobiliser maintenant pour sauver lesmissions Martiennes de 2016 et 2018.
C’est un combat que nous pouvons et que nous devons gagner. Il est temps de se lever et de parler.
Robert Zubrin est président de Pioneer Astronautics et de la Mars Society (www.marssociety.org). Une édition actualisée de son livre « The Case for Mars: Le Plan pour s’établir sur la planète rouge et pourquoi nousdevons le faire », a récemment été publié par The Free Press.
Si les Américains renoncent à l’exploration planétaire, qui prendra le relais, qui sera la locomotive? Personnellement j’ai de sérieux doutes sur les motivations et les capacités des autres puissances spatiales.
Effectivement, le désintérêt de la présente administration pour l’exploration spatiale est très grave. A mon avis, il faut surtout espérer que le prochain président adopte une politique inverse de celle du président Obama.
Effectivement,il faut maintenant espérer dans la prochaine administration américaine.Robert Zubrin a parfaitement exposé la situation.Les Etats-Unis sont seuls capables de fédérer le monde dans l’aventure martienne,