la couverture du rapport
Le rapport définitif de la commission chargée par le président Obama d’analyser les perspectives du programme d’exploration spatiale, lancé en 2004 par son prédécesseur, vient d’être publié. A cette occasion, le 22 octobre, les membres de la commission ont développé leurs conclusions.
Celles-ci avaient déjà été rendues publiques. En voici les principaux points :
-Les moyens alloués à la NASA sont insuffisants ; sans une augmentation de 3 milliards $ du budget de la NASA (actuellement voisin de 18,5 milliards), les ambitions affichées par l’Amérique en matière d’exploration spatiale ne seraient que chimères.
-La finalité du programme est bien l’exploration de Mars : une confirmation heureuse et essentielle. Malheureusement, la commission considère « qu’on ferait bien » de commencer par des étapes intermédiaires, afin de se préparer progressivement à « l’immense entreprise » du programme martien. La difficulté de l’objectif final étant posée en postulat, l’option « Mars en premier » est éliminée d’emblée. Du coup, le menu des cinq options proposées au Président perd l’essentiel de la portée attendue d’un rapport de ce niveau.
-Les deux premières options, conçues dans le respect des budgets actuellement prévus, ne sont que des repoussoirs, puisque la commission affirme qu’avec ce niveau de ressources rien de sérieux ne saurait être accompli. La Lune ne serait atteinte que dans les années 30, voire plus tard…
-Les deux suivantes correspondent à la vision de la commission en ce qui concerne la faisabilité du programme actuel, dont elle voit l’aboutissement lunaire reporté en 2025, moyennant l’accroissement des ressources. Ces deux options ne différent que par des considérations au sujet de la date d’arrêt des programmes Navette et ISS, de la définition du lanceur lourd, du recours plus ou moins appuyé aux lanceurs dits commerciaux…
-La dernière option, « Flexible Path » (trajet adaptable), propose de développer les moyens de l’exploration, tout en renonçant dans un premier temps au retour sur la Lune au profit de l’atteinte d’une suite de destinations de plus en plus ambitieuses. Elle évite ainsi de se laisser piéger par le gouffre financier d’infrastructures lunaires, tout en permettant d’accélérer les développements essentiels (lanceur lourd, vaisseau spatial). Par contre, elle souffre du délai imposé à l’atteinte de son objectif structurant, Mars.
-Point positif, la commission recommande une ouverture franche à la coopération internationale ; une opportunité et un défi pour l’Europe, pour trouver dans cette entreprise une place digne de la grande puissance qu’elle est. Les décisions courageuses ne devront pas venir que du gouvernement des Etats-Unis.
-Enfin, La commission Augustine incite à miser sur de nouveaux entrants, tel SpaceX avec son lanceur Falcon 9 et sa capsule Dragon, pour assurer les vols habités vers la Station Spatiale. Un pari que beaucoup de décideurs (y compris le nouveau patron de la NASA) considèrent cependant avec scepticisme, eu égard à l’enjeu de la sécurité des astronautes.
Lors de la présentation du 22 octobre, Norman Augustine, bien que se défendant de faire des recommandations, est apparu nettement en faveur de l’option « Flexible Path », déclarant : « Il y a beaucoup de choses très intéressantes à réaliser le long du chemin qui nous préparera progressivement à l’entreprise immense du programme martien… Nous pouvons faire des vols habités circumlunaires [intérêt ?], circummartiens, visiter des astéroïdes, les satellites de Mars… Il nous semble que cela serait plus intelligent que d’attendre une quinzaine d’années avant d’atteindre un premier événement majeur ». Notons que dans ce scénario le projet de descente sur la Lune, sans parler de celui de base lunaire, n’apparaît plus.
Norman Augustine a également insisté sur la crédibilité de l’alternative consistant à faire confiance aux lanceurs commerciaux pour le transport des astronautes en orbite basse, considérant que cette option « offre le potentiel de produire un véhicule sûr ».
John Logsdon, un expert des questions spatiales de l’Université George Washington, a déclaré qu’on pouvait s’attendre à ce que l’administration ajoute dès 2011 un milliard $ au budget de la NASA et qu’elle se prononce pour une stratégie proche de l’option « Flexible Path ». Il considère qu’on se dirige très probablement vers une prolongation de la vie de la Station Spatiale au-delà de 2015 et vers un recours aux moyens de transport « dits commerciaux ». Ce prolongement satisferait certainement les partenaires de la Station, mais il affaiblirait la perspective du programme d’exploration, dont le rythme apathique est déjà préoccupant.
Prochaine étape décisive : la prise de position du Président Obama, attendue en novembre, et celle du Congrès. Puis ce sera à l’Europe de se trouver au premier plan, puisqu’elle devrait annoncer sa politique en matière d’exploration spatiale et ses propositions en matière de coopération internationale dans le courant de l’année prochaine.