NASA « Release 10-216 » du 9 septembre 2010,
par Dwayne Brown, Siège, Washington et
William Jeffs, Johnson Space Center, Houston.
Traduction et commentaire de Pierre Brisson
Houston-. Des données recueillies par la sonde PHOENIX de la NASA suggèrent que de l’eau liquide a interagi avec la surface de la planète Mars au travers de son histoire et jusqu’au temps modernes. L’étude fournit également de nouveaux indices selon lesquels l’activité volcanique a persisté sur la planète rouge jusqu’à des périodes géologiques récentes, vieilles de seulement quelques millions d’années.
Bien que la sonde, arrivée sur Mars le 25 mai 2008, ne soit plus opérationnelle, les scientifiques de la NASA continuent à analyser les données de cette mission. Les découvertes récentes sont basées sur des données concernant le dioxyde de carbone, qui constitue environ 95% de l’atmosphère martienne.
Selon Paul Niles, un scientifique de l’Espace au Johnson Space Center de Houston, « Le dioxyde de carbone atmosphérique est une sorte d’espion chimique. Il s’insinue dans tous les recoins de la surface de Mars et peut nous renseigner sur la présence de l’eau et sur son histoire ».
Phoenix a mesuré avec précision les isotopes de carbone et d’oxygène contenus dans l’atmosphère martienne. Les isotopes sont des versions différentes (ayant des masses atomiques différentes) d’un même élément. Niles est l’auteur principal d’une étude sur ces découvertes, publiée dans l’édition en ligne de Jeudi du journal « Science ». L’étude explique les rapports entre isotopes stables et leurs conséquences pour l’histoire de l’eau et des volcans martiens.
Selon Niles, « les isotopes peuvent être utilisés comme une signature chimique qui peut nous dire d’où tel ou tel corps provient et quels événements il a connus ».
Cette signature chimique, suggère que l’eau liquide existait principalement à des températures proches du gel et que les systèmes hydrothermaux semblables à ceux des sources chaudes de Yellowstone ont été rares tout au long du passé de la planète. Les mesures concernant le dioxyde de carbone ont montré que Mars est une planète beaucoup plus active que ce que l’on pensait jusqu’à présent. Les résultats impliquent que Mars a reconstitué son atmosphère de dioxyde de carbone relativement récemment et que le dioxyde de carbone a réagi avec de l’eau liquide présente en surface.
Les mesures ont été effectuées par un instrument embarqué sur PHOENIX appelé « Evolved Gas Analyzer ». L’instrument a été capable de faire des analyses du dioxyde de carbone plus précises que les instruments similaires embarqués sur les sondes Viking dans les années 1970. Le programme Viking est celui qui avait fourni les seules autres données concernant les isotopes martiens transmises à la Terre.
Vue rapprochée de l'Evolved Gas Analyser
Credit NASA/University of Arizona
La faible gravité et l’absence de champ magnétique sur Mars signifient qu’au fur et à mesure que le dioxyde de carbone s’accumule dans l’atmosphère, il se disperse dans l’espace. Ce processus favorise la perte des isotopes les plus légers, tel le carbone-12, comparé au carbone-13. Si le dioxyde de carbone martien n’avait connu que ce processus de perte atmosphérique sans quelque autre processus additionnel reconstituant le carbone-12, le rapport du carbone-13 au carbone-12 serait beaucoup plus élevé que ce que PHOENIX a mesuré. Cela suggère que l’atmosphère martienne a été récemment réapprovisionnée en dioxyde de carbone émis par les volcans et que le volcanisme a été un processus actif dans un passé récent. Cependant une telle signature volcanique n’est pas présente dans le rapport entre deux autres isotopes, ceux de l’oxygène-18 et de l’oxygène-16, que l’on trouve aussi dans le dioxyde de carbone. La découverte suggère que le dioxyde de carbone a réagi avec de l’eau liquide qui a enrichi l’oxygène du dioxyde de carbone en un isotope plus lourd, l’oxygène-18.
Niles et son équipe en déduisent la théorie que cette signature isotopique signale de l’eau liquide à la surface de Mars suffisamment récemment et abondamment pour affecter la composition de l’atmosphère actuelle. La découverte ne révèle pas d’endroits ou de dates spécifiques pour localiser et situer l’eau liquide et les évents volcaniques mais les récentes manifestations de ces conditions sont les meilleures explications de ces proportions d’isotopes.
La mission PHOENIX était conduite par le Directeur de recherche Peter H. Smith de l’Université d’Arizona (Tucson) avec direction de projet au JPL de la NASA (Pasadena, Californie). C’est l’Université d’Arizona qui a fourni l’appareil utilisé, nommé « TEGA » (pour “Thermal and Evolved Gas Analyzer”).
Commentaire:
Voici une information surprenante car la tendance ces derniers temps était de penser que l’eau liquide avait disparu de la surface de Mars il y a très longtemps.
C’est certes une très bonne nouvelle pour tous ceux qui s’intéressent à la recherche de la vie et qui souhaitent donc qu’il y ait eu cette permanence d’eau liquide. Il faudra cependant réconcilier ces informations avec d’autres informations géologiques montrant que dans de nombreux cas l’eau n’a eu que des effets très limités. Cela serait-il dû au fait particulier que la température de cette eau était très basse (proche du gel) ?
L’avenir nous réserve encore des découvertes passionnantes !
Pierre Brisson