Info NASA J09-030 du 30/11/2009 par William P. Jeffs du Johnson Space Center (Houston).
Traduction et commentaire : Pierre Brisson
En utilisant les instruments analytiques plus avancés aujourd’hui disponibles, une équipe de recherche du Johnson Space Center a réexaminé les résultats de 1996 selon lesquels une météorite contenait de forts indices quant à la possibilité de vie sur l’ancienne Mars.
Les nouvelles recherches se sont concentrées sur l’étude des alternatives pouvant expliquer la création de matériaux considérés comme signes anciens de vie dans la météorite. La nouvelle étude établit qu’une vie ancienne reste l’explication la plus plausible des matériaux et des structures trouvés dans la météorite.
En 1996, un groupe de scientifiques dirigés par David McKay, Everett Gibson et Kathie Thomas-Keprta du Johnson Space Center (« JSC ») de la NASA, a publié un article dans Science annonçant la découverte d’indices biogéniques dans la météorite ALH84001. Une nouvelle étude reprend cette hypothèse avec de nouvelles analyses. Cette étude, « Origine des nano cristaux de magnétite dans la météorite martienne ALH84001 », par Thomas-Keprta et ses co-auteurs Simon Clemett, McKay, Gibson et Susan Wentworth, tous chercheurs à la Direction scientifique de recherche sur les matériaux astronomiques et l’exploration du JSC, est publiée dans le numéro de novembre du journal « Geochemica et Cosmochimica Acta » de la Geochemical Society et de la Meteoritical Society (USA).
Les cristaux de magnétite présents dans ALH84001 ont été sujets de débats concernant la possibilité de vie sur Mars. La magnétite est un minéral à base de fer et magnétique. Sur Terre, certaines bactéries présentes dans le sol ou l’eau secrètent ce minéral dans leurs cellules. L’étude de 1996 suggérait que certains cristaux de magnétite, associés à des globules de carbonates présents dans ALH84001, étaient biogéniques parce qu’ils partageaient beaucoup des caractéristiques trouvées dans des bactéries terrestres. D’autres scientifiques émirent au contraire l’opinion que la magnétite trouvée dans ALH84001 était susceptible d’avoir été produite par des processus inorganiques et que ces mêmes processus pouvaient être recréés artificiellement en laboratoire en chauffant les carbonates selon la méthode connue de décomposition thermique qui formerait des magnétites identiques à celles trouvées dans la météorite martienne.
Credit NASA
Dans cette nouvelle étude, l’équipe de recherche du JSC réévalue la principale hypothèse non-biologique alternative selon laquelle les magnétites auraient été produites par décomposition résultant de la chaleur ou d’un choc. Les auteurs établissent que leurs nouveaux résultats ne permettent pas de soutenir l’hypothèse de formation des magnétites par la chaleur. Ils concluent que l’explication biogénique de leur origine est une hypothèse plus plausible.
« Dans cette étude, nous interprétons nos résultats pour suggérer que l’hypothèse de production in situ par processus inorganique n’est pas compatible avec les données et nous en déduisons que l’hypothèse biogénique est toujours une explication valable » dit le responsable de l’équipe, Thomas-Keprta, chercheur senior pour Barrios Technology au JSC.
« Nous sommes convaincus que l’hypothèse biogénique est plus forte maintenant qu’elle l’était quand nous l’avons proposée la première fois il y a 13 ans. » dit Gibson, chercheur senior à la NASA.
En plus de la nouvelle étude sur ALH84001, l’équipe du JSC en a publié une autre qui, dans des météorites martiennes, identifie des formes ou des morphologies qui ressemblent à des microfossiles et à des formes de microbes présentes dans des échantillons terrestres. Ces nouvelles formes, vues au microscope à balayage électronique, sont appelées biomorphes en raison de leur proche ressemblance à des formes connues produites biologiquement sur Terre. Les biomorphes observés dans les météorites feront l’objet de la part de l’équipe du JSC d’études plus détaillées, incluant des analyses chimiques et isotopiques.
Selon McKay, responsable de la recherche scientifique pour l’exploration et l’astrobiologie à la NASA (JSC), « les preuves étayant la possibilité d’une vie passée sur Mars se sont lentement renforcées durant la dernière décennie. Ces preuves comprennent (1) les indices de la présence passée d’eau en surface y compris des traces de rivières, de lacs et, peut-être d’océans ; (2) les indices d’eau actuellement en surface ou proche de la surface ; (3) les dépôts de minéraux argileux et de carbonates résultant de l’action de l’eau, dans les terrains anciens, et (4) les émissions récentes de méthane dans l’atmosphère martienne, une découverte qui peut avoir plusieurs explications y compris la présence d’une vie microbienne, la source principale de méthane sur Terre. »
Pour lire (en anglais) les deux études, les images et les documents associés sur Internet, allez sur :
http://www.nasa.gov/centers/johnson/home/mars_meteorite.html
Commentaire :
Je me souviens que, quand en 1996 on parlait des bactéries fossilisées dans ALH84001, les gens souriaient, comme si on leur parlait de « petits hommes verts ». La vérité est toujours longue à percer, surtout quand on va à l’encontre des principes communément admis.
Dans le cas présent, nous ne sommes pas encore face à une certitude mais s’il n’y a pas d’autre(s) explication(s) possible(s) qu’un processus de vie, il faudra bien se rendre à l’évidence. En fait, ce sont des investigations in situ approfondies et soigneusement ciblées qui pourraient permettre aux futurs explorateurs d’établir avec certitude l’existence de traces de vie. Ca vaut le voyage !
Pierre Brisson