Communiqué de Presse de la NASA 2010-217 du 29 juin 2010.
Traduction et commentaire de Pierre Brisson
Depuis l’été 2008, après que le rover Opportunity eut fini d’étudier le cratère Victoria, ce qu’il avait fait pendant deux ans, sa destination à long terme a été le cratère Endeavour, beaucoup, plus grand, vers le Sud-Est. Au printemps 2010 Opportunity a parcouru plus d’un tiers des 19 kms du chemin prévu entre les deux cratères et atteint une région en pente douce vers le Sud, offrant une vue des rebords élevés d’Endeavour.
Le 2239ème jour martien (sol) de sa mission sur Mars (12 mai 2010), Opportunity a utilisé sa caméra panoramique (Pancam) pour prendre de nombreux clichés de l’horizon Sud-Est. L’équipe du Pancam a ensuite combiné ces images pour composer une image à « super résolution » montrant les détails d’une partie du rebord d’Endeavour à environ 13 kms, ainsi que quelques traits de reliefs plus lointains. La « super résolution » est une technique d’imagerie qui combine les informations de multiples images de la même cible pour générer une image de plus haute résolution que les images composantes prises individuellement.
Crédit Image : NASA/JPL-CalTech/ Cornell University.
Au dessus des plaines sombres que l’on voit dans la partie basse de l’image, l’horizon, dans la moitié gauche, est principalement une partie du rebord occidental d’Endeavour. Des légendes sur l’image identifient certains des reliefs sur le rebord du cratère. L’équipe scientifique du rover leur a donné les noms de sites visités par le capitaine James Cook lors de son voyage de 1769 à 1771 dans l’Océan Pacifique aux commandes du vaisseau Endeavour. Le terrain plus pâle, à l’horizon au-delà d’Endeavour dans la partie droite de l’image, fait partie d’un dépôt épais de matériel éjecté par l’impact qui a excavé le cratère Iazu, au sud d’Endeavour. Le fait que les éjecta de Iazu soient d’une couleur plus claire que les traits de relief d’Endeavour est cohérent avec le modèle que Michael Wolf (Space Science Institute, Boulder, Colorado) et Ray Arvidson (Washington University, Saint Louis), membres de l’équipe scientifique, ont déduit des caractéristiques optiques qu’Opportunity a mesuré dans l’atmosphère martienne.
Complétant cette image, une carte établie à partir de l’orbite martienne par la Camera « Context », embarquée à bord du satellite MRO de la NASA, montre les positions relatives des cratères Victoria, Endeavour et Iazu, ainsi que d’Opportunity. Tim Parker, de l’équipe scientifique du JPL de la NASA (Pasadena, Calif.), a corrélé plusieurs points visibles sur l’image de la Pancam avec des traits de relief visibles de l’orbite martienne.
Après que l’équipe de contrôle du rover eut choisi Endeavour comme destination à long terme, le but est devenu encore plus séduisant quand des observations du spectromètre CRISM (pour « Compact Reconnaissance Imaging Spectrometer for Mars »), également à bord du MRO, ont trouvé des minéraux argileux exposés dans ce cratère. James Wray de l’Université Cornell (New-York) et ses co-auteurs ont fait état de l’observation de ces minéraux dans les Geophysical Research Letters, en 2009. Les roches argileuses, qui se forment dans des conditions humides avec un pH relativement neutre, ont été trouvées sur Mars à partir d’observations orbitales, sur de grandes étendues, mais n’ont pas encore été examinées en surface. D’autres observations, faites avec ce spectromètre, aident l’équipe du rover à choisir quelle partie du rebord d’Endeavour il convient de visiter avec Opportunity en premier lieu.
Commentaire :
Il est émouvant de participer à cette découverte d’une nouvelle terre, en en percevant progressivement les traits de relief qui sont nommés au fur et à mesure de la progression de nos engins d’exploration. Nous sommes ainsi dans la même position que les contemporains des « grandes découvertes » et nous ressentons sans doute la même curiosité que celle qui les animait à l’attente des lettres relatant les exploits des explorateurs.
Sur le fond, il est effectivement très intéressant de pouvoir envisager d’étudier dans quelques mois, une fois Opportunity arrivé sur place (nous n’y sommes pas encore !), des « gisements » de roches argileuses car c’est dans ces roches, témoins de l’hydratation très ancienne de la surface martienne, qu’on a des chances de trouver un jour quelques indices des balbutiements éventuels de la vie sur Mars.
Pierre Brisson