La stratigraphie, c'est selon Wikipédia, "une discipline des sciences de la Terre qui étudie la succession des différentes couches géologiques ou strates".
Evidemment, cette discipline peut aussi s'appliquer aux autres corps solides du Système solaire, à la condition de pouvoir réaliser des vues verticales, des profils, des couches géologiques qui les composent.
Sur Terre, "il s'agit d'une approche intégrée, en ce que des résultats apportés par la géochimie, la paléontologie, la pétrographie, l'astronomie… sont réunis et exploités à travers différentes méthodes : biostratigraphie, chimiostratigraphie, lithostratigraphie, magnétostratigraphie, cyclostratigraphie… Ces méthodes, développées de façon relativement indépendante, sont ensuite réinvesties dans des approches plus généralistes :
– la chronostratigraphie cherche à établir une échelle des temps géologiques aussi précise et fiable que possible en organisant les données élémentaires que constituent les « unités chronostratigraphiques » ;
– la stratigraphie séquentielle, exploitant la sismique réflexion, cherche à éclairer l'organisation relative des corps sédimentaires en liaison avec les variations cycliques du niveau marin à l'échelle régionale ;
– la stratigraphie génétique cherche à dégager des modèles sédimentologiques généraux pour effectuer des prévisions en sous-sol, en l'absence de données complètes (forages ponctuels).
Les principes de la stratigraphie sont en nombre variable selon les auteurs. Ces principes sont d'une part des postulats, qu'il faut vérifier par l'observation, et d'autre part des relations géométriques entre les formations géologiques étudiées. Les deux principes qui semblent unanimement acceptés sont le principe de continuité et le principe de superposition.
Les principes généraux
– Le principe de continuité : une même couche a le même âge sur toute son étendue.
– Le principe d'uniformitarisme : les structures géologiques passées ont été formées par des phénomènes (tectoniques, magmatiques, sédimentaires ou autres) agissant comme à notre époque.
– Le principe d'identité paléontologique : deux couches ayant les mêmes fossiles sont considérées comme ayant le même âge. Ce principe n'est pas lié aux rapports géométriques entre les couches, mais à la paléontologie ; il se base sur l'existence de fossiles stratigraphiques. Il permet de corréler des séries sédimentaires de régions éloignées.
Les principes précédents souffrent de nombreux contre-exemples et doivent être validés par l'observation de la situation étudiée. Ils sont néanmoins des points de départ utilisés par tous les géologues dans une situation inconnue.
Les relations géométriques entre couches
– Le principe de superposition : en l'absence de bouleversements structuraux, une couche est plus récente que celle qu'elle recouvre et plus ancienne que celle qui la recouvre.
– Le principe d'horizontalité : les couches sédimentaires se déposent horizontalement ; une séquence sédimentaire qui n'est pas en position horizontale a subi des déformations postérieures à son dépôt.
– Le principe de recoupement : les couches sédimentaires sont plus anciennes que les failles ou les roches qui les recoupent.
– Le principe d'inclusion : les morceaux de roche inclus dans une autre couche sont plus anciens que leur contenant.
Exceptions aux principes
Pour chacun de ces principes on peut trouver des exceptions. Ces exceptions dépendent du mode de sédimentation et de l'échelle à laquelle on les observe :- les nappes alluviales les plus récentes peuvent être déposées après l'encaissement de la vallée et être plus basses que les alluvions antérieures (néanmoins, les alluvions récentes ne sont pas recouvertes par les plus anciennes).
– les dépôts fluviatiles et deltaïques ne se déposent pas horizontalement, mais en sédimentation oblique.
– les sédimentations bio-construites ne sont pas obligatoirement horizontales (un récif corallien n'est pas horizontal par exemple).
– etc.
Discordance
Lorsqu'il y a interruption de la sédimentation, suivie d'une déformation (failles, basculement ou plissement) et d'une érosion, il y a discordance entre les couches (ou strates) les plus anciennes déformées et celles plus récentes, horizontales. Il existe aussi des discordances sédimentaires. Elles sont le résultat d'un changement du milieu de dépôt. Ce changement est provoqué par une variation du niveau marin.Une discordance angulaire existe entre deux couches superposées dont les pendages sont différents de part et d'autre de la surface de discordance. La série inférieure de strates a alors subi des déformations (basculement dans le cas d'une série monoclinale, plissement dans le cas d'un synclinal ou d'un anticlinal: dans ce cas c'est une discordance angulaire sur structure plissée).Certaines strates concordantes en un point, peuvent progressivement devenir discordantes : c'est une discordance progressive.
Lacune
Lorsqu'il n'y a pas de continuité chronologique entre deux couches, on parle de lacune. Il y a deux types de lacunes :- Lacune d'érosion : l'érosion a enlevé des couches, puis la sédimentation a repris en laissant la lacune.
– Lacune de sédimentation : pendant la période correspondant à la durée de la lacune, la sédimentation s'est interrompue. Cela peut être dû à une régression marine".
Voyons maintenant sur Mars, un très beau cas de stratigraphie observé à distance, grâce à la caméra haute résolution de la sonde MRO.
Nous sommes dans Ganges Chasma, l'un des sous-systèmes de Valles Marineris à -8,1° par 307,5°E.
Le cliché date du 23 décembre 2008 (Ls = 178,7°), il est 15h42 heure locale. MRO se trouve à 286,8 km d'altitude, la résolution de l'image est de 28,7 cm par pixel. C'est l'été boréal.
Le cliché ci-dessous présente une vue d'ensemble de la zone, le contact entre l'escarpement et la plaine alentours. L'ensemble est très peu cratérisé. Ganges Chasma apparaît comme une profonde dépression dont on ne voit pas le plancher sur ce cliché, mais simplement une partie de versant.
Vue d'ensemble.
Cette vue rapprochée de la zone de contact, révèle la vraie nature du versant : une pente stratifiée, faite de centaines, voire de milliers de couches géologiques superposées les unes aux autres. On observe très bien certaines des couches géologiques les plus sombres, régulières, plus ou moins épaisses. Elles sont à l'origine de départs de blocs plus ou moins gros qui dévalent la pente. Elles semblent elles-mêmes composées de ces blocs plus ou moins bien soudés. Entre les couches sédimentaires, on observe parfois des zones rugueuses et parfois des zones lisses.
Il est remarquable de noter que la plaine amont, dont les terrains sont très clairs, doit être bien plus altérable et moins résistante face à l'érosion, que les couches et les dépôts qui composent le versant et qui sont plus sombres. D'ailleurs, la plaine claire doit être recouverte d'une couche de poussière et de débris éoliens alors que c'est probablement moins le cas sur les pentes du versant.
Vue rapprochée.
Sur ce zoom, la nature du versant et des couches géologiques qui le composent, apparaît encore mieux. Il pourrait s'agir de matériaux volcaniques, que l'on pense par ailleurs composer les plaines alentours de Valles Marineris.
On notera que l'érosion et la gravité ont dénudé le versant. Ainsi outre les couches sédimentaires sombres que l'on peut suivre le long de l'escarpement, d'épaisses couches géologiques claires et lisses apparaissent distinctement entre les couches sombres…
Zoom sur la vue rapprochée.
Au regard de nos connaissances, on ne peut que se borner à émettre des hypothèsesp our tenter d'expliquer un tel paysage. Personne ne peut encore affirmer ce qu'il s'est produit ici, même si l'on pense que les couches géologiques sombres sont liées à des épisodes volcaniques, tandis que les couches géologiques claires pourraient être des dépôts liés à des écoulements fluviatiles, des phénomènes éoliens ou encore des épisodes volcaniques…
© Texte : Gilles Dawidowicz/APM et Wikipédia.
© Images : NASA/JPL/University of Arizona.