A l’occasion de la présentation de la proposition de budget NASA 2013 qui ne comporte pas de missions martiennes robotiques au-delà de la mission Maven de 2013, Robert Zubrin, président de la Mars Society, a émis une critique véhémente du programme de la NASA dont la traduction figure ci-après.
Le président Obama saborde le Programme Martien
Les plans du Président pour la NASA sont totalement faux.
Plus de saut de géant pour la NASA.
par Robert Zubrin – traduction Pierre Brisson
Dans son budget pour l’année fiscale 2013, présenté au Congrès le 13 Février, l’Administration Obama a réduit à néant le financement des futures missions d’exploration de la NASA vers Mars. Le laboratoire Curiosity de la mission MSL est actuellement en route vers la Planète rouge et le petit orbiteur Maven qui est presque terminé et dont le lancement est prévu en 2013 sera bien envoyé mais c’est tout. Aucun financement n’a été accordé pour les sondes martiennes déjà prévues comme missions conjointes avec l’Agence spatiale européenne en 2016 et 2018 et plus rien après cela n’est financé. Cela fait entrer le programme spatial américain dans une crise grave.
L’effort de la NASA pour l’exploration de Mars a été brillamment couronné de succès parce que, depuis 1994, il a été traité comme une campagne, avec des sondes lancées tous les deux ans, en alternant les orbiteurs et les atterrisseurs. En conséquence, des opérations combinées ont été possibles, avec les orbiteurs fournissant des liens de communication et d’orientation de reconnaissance aux rovers en surface qui à leur tour ont pu mener des recherches sur le terrain pour vérifier et calibrer les observations faites à partir de l’orbite martienne. Ainsi, les grands « treks » des rovers Spirit et Opportunity, lancés en 2003, ont été pris en charge à partir de l’orbite, par Mars Global Surveyor (« MGS », lancé en 1996), Mars Odyssey (lancé en 2001) et Mars Reconnaissance Orbiter (« MRO », lancé en 2005). Mais, après avoir servi dix ans en orbite, MGS est maintenant hors service et, si nous attendons jusqu’aux années 2020 pour reprendre l’exploration de Mars, le reste des orbiteurs ne seront plus là non plus. Il en sera de même pour les équipes expérimentées qui les ont créés. En fin de compte, c’est tout le programme qui sera complètement détruit et nous devrons repartir de zéro.
En outre, si les coupes demandées par l’Administration sont acceptées, nous allons non seulement détruire le programme américain d’exploration de Mars mais aussi saboter celui de nos alliés européens. Les missions 2016 et 2018 ont été conçues comme un projet conjoint de la NASA et de l’ESA, avec les Européens contribuant pour plus de 1 milliard de dollars à l’effort commun. Mais si l’Amérique trahit son engagement, les partisans européens de l’exploration de Mars seront « laissés en plan » et le partenariat ainsi que les deux missions seront perdus.
Le programme de vols spatiaux habités de l’Amérique est actuellement, lui aussi, complètement à la dérive. A moins d’être réorganisé et d’axer ses efforts sur les missions et engagement à atteindre des objectifs importants de manière efficace dans un délai qui ait un sens (comme le programme robotique de Mars l’a été jusqu’à présent), il pourrait bien s’avérer indéfendable dans la perspective du tsunami fiscal à venir. Mais le programme d’exploration de Mars EST défendable. Ses objectifs sont réels et rationnels, son coût est raisonnable et il peut faire état d’une expérience de réussite formidable. Il peut et doit être sauvé.
Il n’existe aucune justification pour les coupes proposées. Le gouvernement fédéral américain est peut-être sur le chemin de la faillite mais ce n’est pas à cause de la NASA. Depuis 2008, les dépenses fédérales ont augmenté de 40 pour cent mais les dépenses de la NASA sont restées les mêmes…l’hémorragie financière doit être jugulée là où la brèche se trouve et nulle part ailleurs.
(voir une illustration de la répartition du budget US sur : http://www.marssociety.org/home/press/announcements/nasas2013budgetputsbrakesonplanetprobes)
Le programme « Mars » n’est pas annulé pour mettre des fonds à disposition de futures missions vers d’autres planètes. En fait, le plan du président Obama pour l’Espace ne prévoit aucun financement pour quoi que ce soit de ce type.
Dans tous les cas, le coût n’est pas le problème. Avec les Européens assumant leur part, une contribution équivalente de un milliard de dollars de la NASA, répartie sur les six prochaines années, serait suffisante pour financer à la fois les missions de 2016 et 2018 au niveau d’un milliard de dollars chacune. Cela nécessiterait moins de 1 pour cent du budget actuel de la NASA. Il n’y a aucune excuse pour ne pas le faire.
En vérité, ce qui est vraiment remarquable à propos du management de la NASA par l’administration Obama, c’est qu’elle a réussi à détruire à la fois le programme des vols habités et celui de l’exploration robotique planétaire sans faire aucune économie. En 2008 les dépenses de la NASA étaient de 17,4 milliards de dollars et le budget de cette année est de 17,7 milliards de dollars. Pourtant, en 2008, la NASA a pu mener un programme actif d’exploitation de la navette spatiale, la préparation de la mission, essentielle, de sauvetage du télescope spatial Hubble, le développement de systèmes pour faire revenir des astronautes sur la Lune d’ici à 2019, la construction des sondes martiennes Curiosity et Maven et la préparation des plans d’un orbiteur pour la lune jovienne Europa. Aujourd’hui, les navettes n’existent plus, le programme lunaire n’existe plus, et les sondes de cette décennie pour Mars et Jupiter ont disparu (le tout sans qu’il en résulte quelque économie que ce soit). En termes de dommages causés par dollar dépensé, ce résultat peut être considéré comme un record mondial.
…
Mars est la clé de l’avenir de l’humanité dans l’Espace. C’est l’astre le plus proche qui possède toutes les ressources nécessaires pour permettre la vie et la civilisation technologique. Sa complexité exige absolument les compétences d’explorateurs humains pour ouvrir la voie à l’établissement de l’homme sur son sol. C’est par conséquent l’objectif le plus approprié du programme de vols habités de la NASA et la priorité la plus appropriée de ses missions robotisées…
Le programme d’exploration planétaire de l’Amérique est l’un des grands chapitres de l’histoire de notre pays, de la science et de la civilisation. Son abandon ne représente rien de moins qu’une acceptation assumée du déclin américain… Cette évolution est inacceptable.
Si l’administration est autorisée à mettre fin à l’effort d’exploration de Mars, la NASA va perdre son entreprise la plus efficace (l’une des rares qui donnent les résultats qui justifient le programme spatial dans son ensemble comme entreprise nationale). Le pays va perdre un de ses « joyaux de la couronne » ; les scientifiques vont perdre leur chance de trouver la vie ailleurs que sur Terre et l’humanité perdra le fruit du seul effort important qui ait fait réaliser de vrais progrès, visibles, en direction de l’ouverture d’un nouveau champ de liberté (« frontier ») en dehors de la Terre.
Le Congrès ne doit pas le permettre.
Le Dr. Robert Zubrin est président de Pioneer Astronautics et président de la Mars Society. Il est, entre autres, l’auteur de « Cap sur Mars » (« The Case for Mars »).
[RH1]Pour la transition