(par Florent Daumas)
Financé par la Direction de la mission de technologie spatiale (STMD) de la NASA, le projet Kilopower est né en 2012 et vise à construire des réacteurs simples et peu coûteux qui peuvent être utilisés pour une grande variété de missions planétaires, dont l’installation de l’Homme sur Mars. Le besoin est réel et la NASA a trouvé une solution qui résiderait dans le potentiel de l’énergie nucléaire et notamment de la fission nucléaire, la même qui est employée dans les centrales terrestres.
Mardi 18 janvier 2018 le projet Kilopower a refait parler de lui car les premiers tests, réalisés dans le désert du Nevada, auraient été une réussite. Au cours d’une conférence qui s’est déroulé au National Atomic Testing Museum de Las Vegas, la NASA et le ministre de l’Energie ont présenté la suite du projet : au mois de mars 2018 pourrait se tenir le premier essai grandeur nature.
En réalité, Kilopower est une idée relativement peu complexe : il est question ici d’une mini-centrale nucléaire susceptible d’être transportée par les astronautes et en capacité de résister aux conditions climatiques extrêmes de Mars.
Son réacteur nucléaire, fonctionnant à l’uranium, n’est que du calibre d’une boite de conserve, la chaleur produite par fission est ensuite transférée par un caloduc à vapeur de sodium et fait alors tourner un moteur Stirling.
Principe du moteur Stirling :
Phase 1 : Le gaz de travail (ici de la vapeur de sodium), chauffé par le réacteur nucléaire, tend à occuper plus de place et repousse le piston chaud au fond de sa course (vers la gauche). Lorsqu’il est arrivé en butée, l’expansion du gaz se poursuit en direction du cylindre froid et repousse le piston froid (vers le haut). Ces mouvements sont transmis à la roue.
Phase 2 : Le gaz est maintenant à son volume maximal. La roue transmet son mouvement au piston chaud (vers la droite), ce qui envoie la plus grande partie du gaz vers le cylindre froid, où il va se refroidir. La chaleur est alors dissipée via les radiateurs en partie haute de la mini-centrale.
Phase 3 : Presque tout le gaz est maintenant dans le cylindre froid et le refroidissement du gaz continue. La pression du gaz est à son minimum. Il se contracte et le piston froid redescend.
Phase 4 : Le gaz est maintenant à son volume minimum et le piston chaud est tiré vers la gauche par la roue et les transmissions. Le gaz est ainsi aspiré dans le cylindre chaud. Comme il se réchauffe, son volume augmente et le cycle recommence.
Plusieurs Kilopower permettront d‘alimenter en énergie les futurs camps de base à la surface de la planète rouge, notamment quand les nuits sont trop longues pour adopter de l’énergie solaire ou au cours des tempêtes de sable.
Évalué à 10 KW, un réacteur Kilopower dégage assez d’énergie pour alimenter deux foyers américains moyens et peut fonctionner sans interruption pendant dix ans sans ravitaillement.
Nous parlions d’un réacteur similaire dans notre dossier « Résidences martiennes : taupinières ou maisons de verre ? ».
prototype de test du réacteur Kilopower. Kilopowers reliés à une base Martienne.
(docs NASA)
Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=2M2cDJAiXPE
Florent Daumas
Bonjour,
Je suis étudiante en ingénieure spatiale et je suis actuellement sur un projet, avec un petit groupe d’autres étudiants, qui consiste à dimensionner et modéliser un rover pressurisé habitable pour Mars. L’une des solutions qui a retenu notre attention pour fournir l’énergie nécessaire à notre rover est le kilopower qui est innovant, puissant et viable sur Mars.
Vous semblez bien connaitre le sujet alors j’aurais pour vous quelques questions:
L’avantage de ce système est qu’il peut être éteint rapidement contrairement à une centrale nucléaire, auriez vous un ordre d’idée du temps d’émission de rayons gama après extinction?
Si les dimensions du kilopower sont assez facilement trouvable je n’ai pas trouvé d’information précise quant à sa masse, auriez vous ce renseignement?
Merci d’avance
Il me paraît impossible d’imaginer un tel générateur sur un rover pressurisé, pour les raisons suivantes :
-1 générateur de 10 kW a une masse de 1800 kg ; or il faut plusieurs dizaines de kW pour motoriser le rover pressurisé ; c’est trop massif ;
-ce générateur doit être équipé d’un radiateur de surface suffisante pour dissiper la chaleur non utilisée dans le processus de transformation de la chaleur en électricité ; voyez les dimensions du projet NASA! Il n’y a pas de mer ou de fleuve pour évacuer ces calories, il faut les rayonner !
-mais le plus rédhibitoire, c’est l’ambiance radiative créée par le générateur quand il fonctionne, et même après qu’on l’ait arrêté, pendant une longue durée ; il faut bien voir que le projet NASA prévoit que le coeur du réacteur, coiffé d’une part d’un bouclier antiradiations, est enterré dans le sol ; on obtient ainsi la protection requise, mais pas question de mobilité.
Vous devriez vous orienter plutôt soit vers des batteries (Li-ion) ou vers des piles à combustible oxygène / méthane ou méthanol.
Richard Heidmann