Le 11 juillet, Space.com a publié un article de son journaliste, Dave Mosher, mettant en évidence les risques induits par la poussière martienne. Cela peut et doit amener quelques réflexions.
Les risques résultent de la nature et de l’abondance des poussières, de la taille des grains, de la sécheresse de l’air martien, de la puissance des tempêtes et de la faible gravité martienne.
La poussière recouvrant la surface de Mars est composée de grains environ 50 fois plus fins que les grains de poussières terrestres. Leur composition chimique est inconnue bien que leur teneur élevée en oxydes de fer soit fortement probable. Les vents de l’atmosphère les charrient depuis des milliards d’années ce qui les a probablement émoussés à la différence des grains de poussière lunaire.
La sécheresse de l’air fait qu’ils sont facilement chargeables électriquement (effet triboélectrique) et donc « collants ». La faiblesse de la gravité les maintient en suspension longtemps ce qui aggrave leur capacité de nuisance.
Les conséquences négatives pour les astronautes seront de trois ordres :
1) Par l’effet électrostatique et du fait de la finesse des grains, la poussière risque de coller aux scaphandres et à tous les équipements. Elle pourrait éventuellement gripper des mécanismes (bien que cela n’ait pas été le cas pour les rovers) et il faut prévoir de nettoyer constamment la surface des équipements divers.
2) La poussière pourra être d’autant plus nocive à inhaler qu’elle est plus fine car elle peut pénétrer plus profondément dans les poumons.
3) Les mouvements des astronautes en extérieur et éventuellement leur départ de la planète rouge pourraient être gênés par les tempêtes de poussière qui se produisent régulièrement au début du printemps, peuvent être globales et durer des mois.
2. Commentaires.
La poussière martienne est un vrai problème, que les promoteurs de la « cause » martienne ne peuvent l’ignorer. C’est un défi parmi d’autres mais il n’y a aucune raison d’être pessimistes et de dire que nous ne pourrons y apporter de réponses satisfaisantes.
Il nous faut penser à des équipements qui empêcheront ces poussières d’envahir l’habitat, l’intérieur des scaphandres ou les mécanismes dont les jonctions se révéleraient, éventuellement, sensibles à leur intrusion. Pour l’habitat, c’est d’abord au niveau du sas qu’il faudra agir. Pour les astronautes, il faudra prévoir des masques avec des filtres particulièrement fins. Les jointures des scaphandres et des véhicules devront être particulièrement protégées et les astronautes devront disposer d’aspirateurs puissants équipés de filtres adéquats et d’un système efficace de compactage et d’évacuation de la poussière. Les véhicules devront, comme les rovers, disposer d’antennes très fines qui dissiperont l’électricité statique. D’une manière générale les matières antistatiques devront être recherchées et étudiées en vue de leur utilisation dans tous les équipements exposés à l’extérieur.
Il est impératif que la poussière soit davantage étudiée et qu’elle le soit sur place, rapidement, avant même un éventuel retour d’échantillons (que beaucoup, comme David Beaty, le chef du programme scientifique pour Mars, semblent estimer nécessaire). Les propriétés électrostatiques aussi bien que les caractéristiques physiques et la composition chimique de la poussière peuvent en effet être parfaitement étudiées à distance par des robots. On peut également penser que l’étudier in situ est indispensable car les problèmes qu’elle pose résultent non seulement de ses caractéristiques physiques et chimiques mais aussi des conditions très particulières de l’environnement martien (sécheresse, gravité, température) et le « laboratoire » où ces conditions peuvent être le mieux réunies, c’est la planète Mars elle-même.
Pour équiper les sondes prochaines d’instruments d’étude adéquats, il faut convaincre les décideurs de mener en parallèle la recherche in situ et la préparation des vols habités (pour une recherche in situ ultérieure plus efficace). Dans cette perspective, l’étude du sol de Mars est aussi utile que celle de son sous-sol.
Pierre Brisson
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