Traduction de l’article http://www.jpl.nasa.gov/news/news.php?release=2014-022 du site JPL par Pierre Brisson
De nouveaux résultats provenant de la collecte et de l’analyse d’échantillons de roches le rover Opportunity (mission MER de la NASA) ont confirmé un environnement humide qui était plus doux et plus ancien que les conditions acides et oxydantes racontées par les roches examinées précédemment par le rover.
Autoportrait du rover Opportunity constitué à partir d’images de la Pancam prises entre le 3 et le 6 janvier 2014. Les panneaux solaires sont très poussiéreux, pourtant un coup de vent les a un peu nettoyés quelques jours avant les prises de vues. L’ombre du mat porteur des caméras apparait mais bien sûr pas le mat lui-même (situé à l’emplacement de l’étoile noire) qui ne peut pas s’autoimager. (Doc. NASA/JPL-Caltech/Cornell Univ./Arizona State Univ.)
Dans le numéro du 24 janvier de la revue Science, Ray Arvidson, professeur à l’Université de Washington (St Louis) et PI adjoint d’Opportunity, décrit en détail les découvertes faites par le rover et comment ces découvertes ont fait évoluer notre connaissance de la planète. Selon Arvidson et son équipe, la dernière constatation d’Opportunity est tout à fait marquante.
Selon Arvidson, « ces roches sont plus âgées que toutes celles que nous avons examinées précédemment, au cours de la mission et elles révèlent des conditions plus favorables pour la vie microbienne que toutes celles examinés précédemment ».
Alors que l’équipe d’Opportunity célèbre le 10ème anniversaire du rover sur Mars, elle pense aussi aux nouvelles découvertes que pourrait faire le robot et, sur la base d’une meilleure compréhension de Mars, comment anticiper les plans pour des missions habitées vers la planète dans les années 2030.
A l’origine, la mission d’Opportunity ne devait durer que trois mois. Le jour de son 10e anniversaire sur la planète rouge, Opportunity examine le bord du cratère Endeavour. Il a roulé 38,7 km depuis l’endroit où il a atterri le 24 janvier 2004. Ce site est à l’opposé, sur la planète, de celui où se trouve Curiosity, dernier rover martien de la NASA.
L’environnement du cratère Endeavour dans Meridiani Planum, avec le tracé des 39 km parcourus par Opportunity. Clay Minerals indique les zones où de l’argile a été repéré. L’argile est révélatrice d’une action longue durée de l’eau. (Doc. NASA/JPL-Caltech/JHUAPL/WUSTL)
Pour trouver les roches qui méritaient le plus d’être étudiées, l’équipe du rover au JPL de la NASA à Pasadena (Californie), a conduit Opportunity dans une boucle, balayant le sol de ses instruments, dans une zone du rebord d’Endeavour appelée Matijevic Hill. La recherche a été guidée par un instrument de cartographie minéralogique embarqué sur MRO, satellite de la NASA qui n’est arrivé dans l’environnement martien qu’en 2006, longtemps après que la mission d’Opportunity aurait dû prendre fin.
À partir de 2010, l’instrument de cartographie, appelé « CRISM » (pour « Compact Reconnaissance Imaging Spectrometer for Mars », a détecté sur Matijevic Hill des preuves d’un minéral argileux riche en fer connu sous le nom de « smectite ». L’équipe d’Opportunity s’est fixé l’objectif d’examiner ce minéral dans son contexte naturel – où il se trouve, comment il se situe par rapport aux autres minéraux et aux couches géologiques de l’endroit – une méthode utile pour recueillir plus d’informations sur cet environnement ancien. Les chercheurs croient que les conditions humides qui ont produit la smectite sont antérieures à la formation du cratère Endeavour, il y a environ 4 milliards d’années.
Vue fausses couleurs prise par la Pancam le 11 octobre 2012 sur la zone Whitewater Lake de l’affleurement Matijevic Hill sur les pentes de Cape York en bordure du cratère Endeavour. La veine noire contient des minéraux formés en présence d’aeu. La zone brossée au centre mesure 4 cm de large. La structure Matijevic Hill est antérieure à la formation du cratère. (Doc. NASA/JPL-Caltech/Cornell Univ./Arizona State Univ.)
Par mesure du taux de différents oxydes, les géologues peuvent caractériser les minéraux observés et définir de quelle variété de minéraux terrestres ils sont proches. Ainsi ceux trouvés sur les bords d’Endeavour sont voisins de la variété d’argile désignée Montmorillonite sur Terre (variante de Smectite). Les mesures sur Espérance et Lihir ont été effectuées en février 2013 alors que le rover opérait toujours sur Cape York. (Doc. NASA/JPL-Caltech/Washington Univ. in St. Louis )
«Plus nous explorons Mars, plus cela devient intéressant. Ces derniers résultats nous offrent encore un autre genre de cadeau qui arrive juste à temps pour fêter le 10e anniversaire d’Opportunity sur Mars », déclare Michael Meyer, responsable scientifique du programme d’exploration de Mars de la NASA. «Nous trouvons encore plus d’endroits où Mars se révèle avoir été une planète plus chaude et plus humide. Cela nous encourage encore plus à y poursuivre la recherche de preuves de vie passée ».
La santé d’Opportunity n’a pas connu beaucoup de changement au cours de cette dernière année et le véhicule reste un partenaire de recherche tout à fait efficient pour l’équipe de scientifiques et d’ingénieurs qui chaque jour établissent les actions à effectuer sur Mars.
«Cette semaine, nous regardons tout ce qu’Opportunity nous apporté pendant cette décennie mais il y a encore plus de bonnes choses à venir », déclare Steve Squyres de l’Université Cornell, Ithaca, NY, chercheur principal de la mission. « Nous étudions un rocher juste en face du rover qui est différent de tout ce que nous avons vu auparavant. Mars ne cesse de nous surprendre, tout comme dans la première semaine de la mission. »
JPL gère le projet Mars Exploration Rover (« MER ») de la Direction des missions scientifiques de la NASA à Washington. Le jumeau d’Opportunity, Spirit, qui a fonctionné pendant six ans et leur successeur, Curiosity, ont également fourni de précieuses informations sur la diversité des milieux aqueux de l’ancienne Mars, allant de sources chaudes jusqu’à des cours d’eau. Les orbiteurs de la NASA, Odyssey et MRO étudie l’ensemble de la planète et assistent les rovers.
«Au cours de la dernière décennie, les rovers martiens ont fait de la planète rouge notre lieu de travail, notre quartier», déclare John Callas, directeur du projet MER de la NASA qui a construit et exploite Opportunity. « La longévité et les distances parcourues sont remarquables. Mais plus importantes encore sont les découvertes qui sont faites et l’inspiration qui en a résulté pour cette génération ».
Commentaire:
Si jamais elle existe, la vie martienne doit être rare en surface compte tenu des conditions extrêmes et particulièrement des radiations. Il est moins improbable qu’elle existe encore ou qu’elle ait existé dans la profondeur du sol. Dans ce cas, elle a pu remonter en surface par intermittences et laisser des traces. Comme les conditions sont très hostiles depuis très longtemps, le problème est de savoir depuis combien de temps. Le temps qui implique l’érosion et la transformation (diagénèse, métamorphisme ou destruction par irradiation) a pu tout faire disparaître mais certaines roches sont plus « conservatrices » et les meilleures parmi celles-ci sont les argiles (entre autres, la smectite). C’est pour cela que, du côté du cratère Gale et de Curiosity, les chercheurs attendent beaucoup de l’exploration de la couche géologique inférieure du Mont Sharp qui est précisément très riche en smectite (d’après ce que les satellites martiens ont repéré). L’idéal serait de trouver un escarpement avec éboulement récent dans cette couche géologique. « Récent » impliquerait que la roche accessible aux instruments du rover (beaucoup plus performants que ceux d’Opportunity) n’ait pas été encore abîmée par les radiations. Compte tenu du relief très tourmenté du Mont Sharp, même à son pied, trouver un tel site n’est pas impossible.