Mise à jour du 31 mars 2016 : nous avons publié une courte vidéo de la simulation sur notre chaine YouTube :
Les piscines servent en général à l’entrainement des astronautes pour des sorties EVAs autour de la station orbitale. Dans ce cas ce sont des conditions de type zéro g qui sont recréés, les cobayes étant lestés pour se retrouver en flottaison neutre. Les piscines peuvent servir aussi à simuler la pesanteur régnant sur des corps comme la Lune (1/6ème de g) ou Mars (0,38 g) en lestant un peu plus le cobaye. Il faut noter que l’on peut dans ce cas simuler deux situations différentes : le cas de l’astronaute dans son habitat et le cas de l’astronaute portant un lourd scaphandre à l’extérieur.
Il faut noter aussi qu’il y a une différence entre simuler le poids et simuler la masse avec les effets d’inertie que cela entraîne lors des mises en mouvement ou freinage. On peut également correctement simuler le poids sans avoir la bonne position du centre de gravité.
Le 10 mars 2016, l’Euro Space Center a accueilli un cobaye « Planète Mars » pour une simulation dans sa piscine « microgravité » de 6 m de profondeur à l’occasion de l’inauguration avec la presse et des personnalités du monde spatial de son exposition temporaire « Zoom sur Mars ».
C’est un Euro Space Center en conditions hivernales qui a accueilli les médias le 10 mars pour l’inauguration de l’exposition « Zoom sur Mars » à l’occasion du lancement prochain d’ExoMars. L’an dernier le centre a reçu 42700 visiteurs et 15000 stagiaires.
Les différents moyens de simulation en gravité réduite de l’Euro Space Center dans le grand hall. Des groupes de jeunes stagiaires sont ici en train de les utiliser. Sur le mur du fond il s’agit de reproduire les déplacements et activités en microgravité. Les cobayes sont suspendus, reliés à des contrepoids qui annulent leur poids (mais la masse inertielle est multipliée par deux). Le déplacement est possible sur une grande hauteur et aussi un peu en latéral, la potence supportant la poulie, pouvant tourner autour d’un axe vertical. Au sol se trouvent les pistes des simulateurs lunaires et martiens. Le cobaye sur une selle est allégé par des ressorts jusqu’à peser 1/6ème (Lune) ou 0,38 (Mars) de son poids. La masse inertielle est augmentée de la masse de l’ensemble siège support d’environ 23 kg. A gauche se trouve la piscine de microgravité qui n’est pas accessible aux stagiaires.
Les objectifs de l’opération étaient les suivants :
-Comparer le simulateur de marche martienne « à l’air libre » de l’Euro Space Center et la simulation en piscine.
-Simuler en piscine le cas astronaute dans l’habitat et le cas astronaute en scaphandre
-Effectuer dans ces conditions des tests de marche, descente d’échelle, et retour en position debout à partir de configurations de type chute au sol
Dans les objectifs de l’opération il y avait aussi de voir comment on peut réaliser au mieux les opérations de lestage tout en assurant des conditions de sécurité.
La piscine de 6 m de profondeur vue au niveau intermédiaire où deux hublots permettent d’observer l’intérieur. Comme le montre l’image murale, les piscines sont très généralement utilisées par les astronautes pour préparer les opérations en microgravité mais peu pour simuler la marche sur une autre planète.
Il existe aussi bien sûr la solution des avions en vol parabolique qui permettent de reproduire la microgravité pendant un peu moins de 30 s. Mais les avions autorisent aussi la reproduction des pesanteurs lunaires et martiennes, sur des durées d’autant plus longues que la pesanteur recréée est plus forte.
Outre le matériel de plongée habituel, une ceinture de lest de 28 kg (masse totalement inhabituelle) avait été préparée pour recréer le poids d’un astronaute de 75 kg sous 0,378 g dans son habitat martien. Un deuxième lest de 31 kg, qui pouvait s’accrocher sur la bouteille avait été préparé pour représenter le poids sur Mars d’un scaphandre de 81,5 kg (scaphandre relativement léger de type Apollo). Les scaphandres navette ou ISS, conçus pour de nombreuses utilisations ont une masse beaucoup plus élevée de 140 kg qui correspond au poids d’une masse de 53 kg sur Mars. Il a été renoncé à préparer un lest de 53 kg en raison de la difficulté à le réaliser et en espérant que les scaphandres martiens seront visés aussi légers que ceux d’Apollo.
Une ceinture de lest de 28 kg !
Mais il faut noter que l’inertie en configuration habitat est plus élevée que normale puisque la masse totale est d’environ 75 (expérimentateur) + 15 (bouteille et air) +4 (lest normal) + 28 = 122 kg (le tout à la masse des habits près). L’astronaute dans son habitat aura lui une inertie correspondant seulement à ses 75 kg.
En configuration lest habitat + lest scaphandre, l’inertie est bien représentée. L’inertie réelle correspondrait à 156,5 kg (75 kg d’expérimentateur + 81,5 kg de scaphandre) alors que l’inertie en conditions de simulation en piscine est de 75 (expérimentateur) + 15 (bouteille et air) + 4 (lest normal) + 28 (lest habitat) + 31 (lest scaphandre) = 153 kg
La piscine vue depuis le niveau supérieur
Une échelle avait été installée dans la piscine pour représenter une échelle intérieure à l’habitat pour le cas du lest à 28 kg et l’échelle d’un Mars Descent ou Ascent Vehicle pour le cas du lest lourd 28 + 31 kg. La ceinture de 28 kg est au fond de la piscine. La passerelle semi immergée est très pratique pour les opérations de mise à l’eau.
Pierre Emmanuel Paulis , instructeur à l’Euro Space Center et équipier de deux missions de simulation à la MDRS à droite et Alain Souchier, avant la mise à l’eau du drapeau martien lors des préparatifs le 9 mars (doc. P. E. Paulis)
La mise en place de l’échelle « du Mars Ascent Vehicle » le 9 mars (doc. P. E. Paulis)
Mise en place pour essais, lors des préparatifs du 9 mars, de la caméra HD Sony HDR AS15 réglée à 170° de largeur de champ (doc. P. E. Paulis)
Après la mise en place et le déclenchement de la caméra le 10 mars, il faut enlever les palmes avant de passer la ceinture de 28 kg qui est au fond. Noter le champ de la caméra qui couvre jusqu’à la surface 6 m plus haut.
A la recherche de la ceinture de 28 kg à gauche. Là les conditions sont pratiquement celles de Phobos qui a une gravité de 0,0057 m/s² soit 6/10000 de la pesanteur terrestre.
Mise en place du lest de 28 kg grâce à Remo et Philippe, les deux plongeurs chargés d’assurer la sécurité. La mise en place de la ceinture nécessite de se coucher sur le dos.
Le combat avec la ceinture
Passage à la position debout
Bien que l’on soit en conditions « interne habitat » avec le lest de 28 kg, passage à la phase installation du drapeau martien.
Noter que le rouge du drapeau est maintenant vu presque noir alors qu’il n’y a que 6m de fond
Dans ces conditions de poids, bondir est facile (malgré le freinage du à la densité de l’eau). Noter que les conditions de poids sont ici semblables à celle des astronautes Apollo sur la Lune. Ils avaient en effet un scaphandre d’un peu plus de 80 kg et en gravité lunaire 1/6 ème de g, leur poids était proche de 30 kg.
Petit tour « à pied » du bassin. On a tendance à marcher sur la pointe des pieds et, comme les astronautes Apollo sur la Lune, à faire un petit pas puis un bond, un petit pas puis un bond, etc.
Remontée d’échelle, toujours dans des conditions de lest interne habitat
Après 8 mn en surface et remise de la ceinture de 28 kg sur la passerelle, descente pour la deuxième plongée.
Ne pas oublier de joindre le drapeau logo APM au drapeau martien
Démonstration de tractions à l’échelle, pendant qu’en haut, Guillaume, de la RTBF, se prépare à descendre filmer in situ
Respirant sur le 2ème détendeur de Philippe, Guillaume descend l’échelle
Tour du fond à pied sous l’œil de la GoPro RTBF. Voir ici le reportage du JT de la RTBF
Gros plan sur la ceinture 28 kg
Montée –facile- à l’échelle à la force des bras
De gauche à droite au fond : Guillaume, Philippe et Rémo
Séance de pose devant le drapeau martien avec gros plan sur le logo APM
Pose devant les drapeaux martiens et APM
Fin de plongée pour Guillaume et Alain. Pour laisser du temps aux autres journalistes, l’opération simulation du poids du scaphandre avec le lest 31 kg a été abandonnée.
Interview après la 2 ème plongée par Pierre Emmanuel Paulis pour la chaîne câblée RIV 54. Le drapeau martien a retrouvé sa couleur rouge. (Doc. P. E. Paulis)
Interview par Laurent Van de Berg de la RTBF sous l’œil de la caméra de Guillaume qui vient de plonger (doc. P. E. Paulis)
Un premier journaliste, Nicolas, s’essaye aussi aux conditions de simulation de poids martien. Lui aussi se déplace sur la pointe des pieds. Ce comportement apparemment standard est-il lié au passage rapide d’un poids normal à un poids allégé ? Les « martiens » finiront-ils par adopter avec l’habitude une marche type terrestre avec pied à plat ?
Pompe sur une seule main : facile !
Pompes sur une main : tout aussi facile (doc. La Meuse)
La dernière phase de l’opération consistait à évaluer les différences avec le simulateur « aérien » de l’Euro Space Center. En plaçant sur une balance le cobaye assis à califourchon sur le simulateur, la tension des ressorts de compensation a été réglée de manière à laisser un poids de28 kg identique à celui du lest. La masse de l’ensemble siège et ordinateur qui envoie les images aux lunettes de réalité virtuelle a été mesuré à 23 kg. La masse de l’ensemble cobaye et dispositif était donc de 98 kg à comparer aux 122 de l’opération en piscine. La première impression lors de l’utilisation du simulateur aérien concerne la position des jambes qui sont écartées « à la cow boy » par la largeur de la selle. Il y a bien sûr aussi l’absence du freinage que produit l’eau dans les mouvements rapides. La différence d’inertie n’est pas très perceptible, vraisemblablement masquée par la différence de viscosité qui est ce que l’on ressent le plus. Et l’une des grandes différences est l’impossibilité de décrire un trajet autre que linéaire ou de se mettre à genoux ou à plat ventre ou de monter une échelle. En ce qui concerne le type de marche (à part l’écartement des jambes) ou les bonds, il n’y a pas de différences sensibles avec la simulation en piscine.
Vue de l’essai sur le simulateur aérien par la même caméra Sony HDR AS15 à champ réglé sur 170° que celle utilisée dans la piscine. Le premier réflexe qui vient aux jambes est à nouveau la marche un pas/un bond. Ici la phase pas…
…suivie de la phase bond
Le deuxième réflexe de marche est la succession de petits bonds réguliers mais qui exige un plus grand balancement latéral du corps. Cette marche était aussi pratiquée par les astronautes Apollo.
On peut essayer les bonds successifs à pieds joints mais cela n’est vite pas confortable. Toutefois cette méthode a été aussi pratiquée par les astronautes Apollo sur la Lune.
En marche normale rapide ras du sol l’attaque du sol se fait avec le talon, jambes restant fléchies pour ne pas rebondir.
Mise en évidence de l’attaque par le talon dans la marche rapide non bondissante
Démarrage de course rapide. Le rapport poids/inertie quatre fois plus faible qu’en conditions terrestres entraîne une forte inclinaison vers l’avant. Le reste de la course est effectué en bonds moyens réguliers d’un pied sur l’autre.
Inversement, pour s’arrêter, il faut s’incliner fortement en arrière
Course rapide en petits pas en essayant de ne pas bondir, qui se traduit par une nette attaque par le talon
Dernier trajet avec les lunettes 3D. Le déplacement dans une vallée qui rappelle les environs de la station MDRS de l’Utah de la Mars Society conduit à croiser un Curiosity.
Au bout du trajet on arrive à proximité immédiate de l’habitat
Entraînement terminé ; il n’y a plus qu’à partir. (Doc. P. E. Paulis)
Merci à l’Euro Space Center pour avoir rendu possible cette opération.
Docs. A. Souchier sauf mention contraire
Liens vers les échos médiatiques en Belgique:
RTBF Vivacité (Radio): http://www.rtbf.be/radio/podcast/player?id=2091246&channel=vivacite
L’Avenir : http://www.lavenir.net/cnt/DMF20160310_00792767
Metro(NL) : http://nl.metrotime.be/2016/03/10/news/belgie-vliegt-prominent-mee-naar-mars/
RTL-Info Espace + 7sur7: http://www.7sur7.be/7s7/fr/1506/Sciences/article/detail/2642781/2016/03/10/De-la-technologie-belge-vers-la-planete-Mars.dhtml
TV Lux: http://www.tvlux.be/video/info/autre/presentation-de-la-mission-exomars_22303.html
Karrewiet: https://www.ketnet.be/karrewiet/10-maart-2016-is-er-leven-op-mars
VRT: http://deredactie.be/cm/vrtnieuws/videozone/nieuws/binnenland/1.2596525