Accès aux zones profondes
On voit que la zone la plus favorable au développement de la vie sur la plus longue durée (et peut-être encore aujourd’hui) est la Zone 3. Le problème est d’y accéder. La première possibilité (pour y découvrir des traces fossiles) est d’utiliser la facilité offerte par les impacts d’astéroïdes qui ont creusé la surface planétaire de cratères profonds jusqu’à son niveau. Parmi ceux-ci, très nombreux sur le bord de la dichotomie de la croûte planétaire, on peut noter le cratère McLaughlin, étudié par Joseph Michalsi et al., et le cratère Gale. On peut en les explorant profiter de deux phénomènes : la création d’un pic central lors de l’impact qui a permis l’extrusion de matériaux profonds sous-jacents ou encore les remontées d’eau dans le fond de ces cratères dont témoignent la présence de sédiments. La hausse des nappes phréatiques causant ces remontées peut avoir résulté de divers phénomènes, notamment volcaniques à l’époque hespérienne. Elles se sont évidemment raréfiées avec le temps.
D’autres endroits très différents (terrains de Zone 2) pourraient également être intéressants : les cavités probablement sous-jacentes aux cheminées du volcanisme de boue dans la région d’Acidalia Planitia contigüe à Chrise Planitia ou encore les cavités probables sous les vestiges des cheminements d’eau d’Hebrus Vallis.
Quelle vie ?
Les formes de vie les plus primitives, archées et bactéries, ont pu commencer à exister avant les eucaryotes (cellules à noyau), sur Mars comme sur Terre. Si le phénomène a commencé à la même époque, il y a plusieurs milliards d’années, il est bien difficile d’imaginer ce qu’a pu donner leur évolution. Cependant les conditions environnementales martiennes étant devenues extrêmement rudes quand la vie sur Terre a commencé à se diversifier et se complexifier, on peut supposer que les éventuelles formes de vie primitive martienne ont peu changé. En tout cas, la faiblesse des niveaux de l’oxygène et du méthane dans l’atmosphère donne à penser que ces éventuels êtres vivants sont peu consommateurs de CO2 et produisent peu de méthane, ou plutôt qu’ils sont très peu nombreux et/ou actifs, ou encore que les lieux qu’ils habitent sont très isolés de l’extérieur.
Les perspectives
Il semble donc que la région la plus propice à la subsistance / évolution du processus de vie sur la planète Mars soit son sous-sol. Cela ne veut pas dire que la vie, une fois éclose en surface, n’y ait pas persisté car on sait la capacité formidable d’adaptation qu’elle possède. Mais il est aussi possible qu’elle se soit cantonnée dans les milieux les plus hospitaliers (chauds, humides, protégés), donc dans les cavités du sous-sol, quitte à faire de temps en temps des incursions en surface, en y laissant quelques traces.
Si la vie a commencé sur Mars, on pourrait donc en trouver les vestiges chimiques dans des endroits aujourd’hui très inhospitaliers. Si on ne trouve rien en surface, il faudra explorer le sous-sol, là où il sera accessible (grottes dans les grands cratères ou dans les failles profondes, forages profonds). Au-delà de vestiges, serait-il possibilité de trouver des formes de vie « active » ? Peut-être en Zone 3 et en Zone 2 compte tenu de leur hydratation et de la durée de cette hydratation, mais il ne serait pas impossible que même la Zone 1 soit habitée. Nous ne devons pas ignorer en effet les capacités extraordinaires de la bactérie « Deinococcus radiodurans » qui résiste aux rayons UV et à de fortes radiations ionisantes, ou encore de l’archée « Archaeoglobus fulgidus » qui, sur Terre, prospère sur les perchlorates. L’exploration de Mars peut encore nous réserver des découvertes extraordinaires !
Références :
*(« An extensive Phase Space for the Potential Martian Biosphere » par Eriita G. Jones et al. en 2011 in Astrobiology, DOI :10.1089/ast.2011.0660
*« Groundwater activity on Mars and implications for a deep biosphere » par Joseph R. Michalski et al. le 20 janvier 2013, in nature Geoscience DOI :10.1038/NGEO1706)
* “Infiltration of Martian outflow channel floodwaters into lowland cavernous systems” par J.A.P. Rodriguez et al. le 20 nov. 2012, in Geophysical Research Letters, Vol.39, L22201, doi:10.1029/2012GL043225,2012