Le rover de la NASA vient de retransmettre de nouvelles mesures de l’ambiance de rayonnements ionisants à la surface du cratère Gale. Ces résultats sont intéressants car ils confirment le rôle d’écran joué par l’atmosphère martienne, malgré sa faible densité. Ce rôle était prévu par les modélisations physiques de l’effet des molécules atmosphériques et du sol sur cette ambiance. En couplant ces modèles avec les relevés de rayonnements incidents dans l’environnement martien, effectués par Mars Odyssey, la NASA avait pu ainsi dresser une mappemonde (fig.1) des doses annuelles en fonction du lieu (c’est-à-dire, principalement, de l’altitude). Les doses varient d’un facteur 2 entre les points d’altitudes extrêmes, soit approximativement comme les pressions atmosphériques.
Fig.1 – Doses annuelles au sol calculées (Doc. NASA)
Sur le graphique ci-dessous (fig.2) le JPL a tracé le niveau du flux de dose relevé par Curiosity, cette fois-ci en unités arbitraires (c’est l’évolution qui importe). On constate bien une (anti-)corrélation avec la variation diurne de la pression atmosphérique, due au cycle thermique de la journée.
Fig.2 – Evolution des doses avec le temps (Doc. NASA/JPL-Caltech/SwRI)
Ces résultats éclairent ceux précédemment publiés (fig.3), qui ne mettaient apparemment en évidence que l’effet de « masque » fourni par le sol, puisque la dose observée était moitié de la dose interplanétaire (cruise, en croisière). Pourquoi n’y voit-on pas d’effet de l’atmosphère ? Les conditions incidentes ont-elles varié entre les instants de mesure en croisière et au sol ? Ou bien les modèles physiques sont-ils en défaut à ce point, par exemple au niveau du calcul des rayonnements secondaires émis par les impacts de particules cosmiques au sol ?
Visiblement, il est trop tôt pour conclure ; attendons de nouvelles données et laissons aux spécialistes le temps d’analyser ces résultats et de fournir des conclusions sur l’ambiance planétaire.
Fig.3 – Comparaison des flux de dose sol/croisière (Doc. NASA/JPL-Caltech/SWRI)
Quoi qu’il en soit, ce dernier graphique, quand on le rapproche de la fig.4 comparant les niveaux en interplanétaire et dans la Station Spatiale (ISS), montre déjà que la situation au sol (pendant le séjour d’exploration de 18 mois) serait semblable à celle des équipages de l’ISS, dont il est envisagé de prolonger les séjours à 12 mois sans que cela semble émouvoir les responsables du programme…
Fig.4 – Comparaison des niveaux ISS/Croisière (Doc. NASA)
Fig.5 – L’instrument de mesure des radiations RAD sur Curiosity (Doc. NASA/JPL-Caltech/Malin Space Science Systems)
Bonjour et merci pour cet article,
Les flux ou le taux d’ions mesuré par le RAD sont issus du vent solaire ?
Bonjour,
le vent solaire envoie un flux continu de protons, mais ce flux est ordinairement insignifiant en comparaison du flux de protons et d’ions lourds du rayonnement cosmique, beaucoup plus intense et dont les particules ont un spectre d’énergie beaucoup plus élevé.
Ce n’est qu’à l’occasion des Solar Particle Events (« orages solaires »), phénomènes peu fréquents et qui ne durent que quelques heures à 1 jour, que le flux de protons solaire devient soudain beaucoup plus intense, au point de pouvoir mettre en danger la vie d’astronautes non protégés. Heureusement, le spectre énergétique reste comparativement limité, ce qui permet d’en bloquer la plus grande partie en se réfugiant derrière une paroi d’une trentaine de cm de matériau riche en H, par ex de l’eau ou du polyéthylène.
R Heidmann