La sonde européenne ExoMars TGO mise en orbite le 19 octobre 2016 par un allumage de son moteur fusée, était loin d’avoir atteint alors son orbite définitive. En effet une mise en orbite autour de Mars en consommant le moins possible de masse d’ergols obéit à deux contraintes : freiner alors que l’on est proche de la planète (le plus bas possible dans son puits de gravité) ce qui va induire un périastre assez bas, et accepter un apoastre élevé mais évitant une ressortie du champ de gravité. L’avantage d’une telle orbite est que l’on peut assez facilement changer le plan d’orbite par de faibles impulsions à l’apoastre. Faire tourner un plan d’orbite de 90° quand on est à 100 m/s va demander 141 m/s d’impulsion, alors que si on est à 3 km/s cela implique un effort inacceptable pour la consommation d’ergols de 4,2 km/s ! Ainsi après sa mise en orbite réussie le 19 octobre, ExoMars TGO s’était retrouvé sur une orbite 300/96000 km parcourue en 4 jours. L’avantage d’un périastre bas est, qu’au prix de petites impulsions de freinage à l’apoastre, on peut faire passer la sonde dans les très hautes couches de l’atmosphère de la planète pour générer un freinage n’échauffant pas trop les éléments extérieurs d’une sonde qui n’est pas enveloppée d’un bouclier thermique protecteur. Contrepartie : l’opération est longue. Et cela explique pourquoi, à part quelques tests de ses instruments scientifiques, TGO n’a pas encore commencé sa phase active d’étude de la planète. Cela se traduit aussi par peu d’images diffusées.
Les étapes de mise en orbite d’ExoMars TGO ont été décrites par l’ESA dans une vidéo :
Pour les missions avec des astronautes à bord, la durée d’une phase d’aérofreinage économique telle que celle pratiquée par TGO ne serait pas acceptable. La méthode peut être utilisée pour de la logistique de support des vols humain, mises en orbite martienne d’un véhicule de retour, de réserves d’ergols ou implantation d’installations sur Phobos dans le cas d’un séjour humain sur ce satellite. Pour les hommes il faut prévoir plus court : soit un premier passage dans l’atmosphère martienne pour mise en orbite suivi plus tard d’un deuxième passage pour rentrée et atterrissage, soit un freinage atmosphérique unique qui conduit à l’atterrissage. La mise en orbite par un premier passage dans l’atmosphère est désignée « aérocapture » et n’a encore jamais été pratiquée. La rentrée directe a été utilisée par toutes les sondes récentes, Curiosity compris, mais dans des conditions sévères de déccélération. Les véhicules avec astronautes devront gérer une entrée plus douce avec des caractéristiques trainée et portance adéquates. L’image ci-dessus, due à Manchu, illustre une aérocapture ou une entrée directe. (Doc. Manchu/APM)
Zoom pour admirer les détails de l’œuvre de Manchu (doc. Manchu/APM)
Comme pour toutes les sondes en orbite autour de Mars (ainsi que les rovers au sol), les opérations ont été affectées par la conjonction qui plaçait Mars pratiquement derrière le soleil ou trop près de celui-ci, vu depuis la Terre, ce qui pouvait jouer sur la qualité des télécommunications. La période de « repos » a duré 11 semaines. Le 25 juin le périastre avait été relevé à 200 km pour suspendre les opérations d’aérofreinage (voir, en anglais, le blog ESA)
Illustration de la conjonction avec les conditions défavorables de communications qu’elle entraîne : passage du signal radio trop près du soleil et perturbations possibles (doc. ESA)
A partir de mi août les communications ont pu redevenir fiables et le centre de contrôle de l’ESA à Darmstadt en a profité pour envoyer une mise à hauteur des logiciels de TGO. Cette mise à hauteur vise à rendre la sonde plus « intelligente » face à différents cas de pannes. La transmission du nouveau logiciel a commencé le 14 août et a été effectuée en 4 paquets cumulant 3 MB. L’opération d’installation et vérification sur les deux processeurs de bord redondants a demandé au total 3 semaines.
Les manœuvres orbitales ont pu alors recommencer avec un micro freinage de 5,3 m/s effectué le 30 août, qui a abaissé le périastre à 140 km. L’objectif est, par de petits freinages (descendant même à 0,8 puis 0,2 m/s) exécutés tous les 2 à 4 jours, de redescendre le périastre vers 110/115 km vers le 19 septembre, pour obtenir un freinage plus rapide mais respectant les températures à ne pas dépasser sur les parois de la sonde, panneaux solaires en particulier. La valeur exacte du périastre dépend de l’extension – variable – de l’atmosphère martienne. L’ajustement est effectué en fonction des résultats obtenus aux précédents passages. Le périastre sera ensuite remonté pour placer la sonde sur son orbite de travail autour de Mars. Alors les données scientifiques et les images pourront affluer.