Traduction de la page http://www.jpl.nasa.gov/news/news.cfm?release=2012-192&rn=news.xml&rst=3421 du site du Jet Propulsion Laboratory
Un mois et un jour après avoir célébré son indépendance avec des feux d’artifice à travers tout le pays, l’Amérique va porter son intérêt pour les grandioses spectacles pyrotechniques aériens, vers les cieux d’un autre monde. Certains dispositifs pyrotechniques (« pyros ») sont si petits qu’ils ne dégagent pas plus d’énergie qu’une boîte d’allumettes. L’un d’entre eux a cependant la même force qu’un bâton de TNT. Qu’ils soient grands ou petits, dans la soirée du 5 Août (fuseau horaire du Pacifique), tous les 76 doivent fonctionner très exactement comme prévu lorsque le prochain rover martien de la NASA, « Curiosity », porté par le laboratoire scientifique « Mars Science Laboratory » (« MSl »), foncera à toute vitesse à travers l’atmosphère de la Planète Rouge vers son point d’atterrissage dans le Cratère Gale
.«Nous arrivons vraiment avec un « bang » ou plutôt une série de « bangs » dit Pete Theisinger, Chef du Projet MSL au Jet Propulsion Laboratory (« JPL ») de Pasadena, en Californie. « On a seulement droit à un essai pour réussir l’atterrissage sur Mars et les charges pyrotechniques que nous utilisons sont formidables pour déclencher instantanément et sûrement des actions irréversibles comme le déploiement d’un parachute ou l’ouverture d’une vanne de carburant. »
Les dispositifs pyrotechniques explosifs sont antérieurs à l’ère spatiale d’environ un millier d’années. Autour de 750 après JC, les habitants de la Chine commencèrent à bourrer une forme primitive de poudre à canon dans des tiges de bambou et à les jeter au feu. A un certain moment, quelqu’un, intéressé à porter cette nouvelle découverte au niveau supérieur (probablement aussi de cette même région), décida que les explosions aériennes seraient encore plus « cool ». La manifestation aérienne de la « fête » était née. Les feux d’artifice firent également partie de la première célébration du jour de l’indépendance des Etats-Unis en 1777.
La pyrotechnie ou les dispositifs « pyromécaniques », sont une extension naturelle mais très complexes de ces premiers feux d’artifice. Au lieu de lueurs rouges dispersées par une fusée et de pétards explosant dans le ciel, l’énergie de ces explosions est contenue dans un mécanisme où elle est utilisée pour déplacer, couper, tirer ou séparer quelque chose. Les explosions contrôlées sont un outil précieux pour l’exploration spatiale au-delà de l’atmosphère terrestre, car elles sont rapides et fiables.
« Quand nous avons besoin d’ouvrir des vannes, de déplacer ou de séparer des choses, nous voulons être sûrs que c’est bien ce qui se passera dans un délai de quelques millisecondes de l’instant où nous l’avons prévu, » dit Rich Webster, ingénieur en pyromécanique au JPL. « Avec les dispositifs pyrotechniques, pas besoin de faire fonctionner un moteur électrique. Pas besoin de débloquer des verrous. Nous séparons les choses à l’explosif…scientifiquement. »
Dix-sept minutes avant l’atterrissage, les 10 premiers des 76 dispositifs pyrotechniques se déclencheront, dans les cinq millisecondes les uns des autres, libérant l’étage de croisière qui aura fourni à la capsule d’entrée (et à son véhicule de descente encoconné comprenant le rover Curiosity), le support énergétique, de communications et de contrôle thermique durant son voyage de 254 jours vers Mars.
Vue d’ensemble des évènements de la rentrée (doc. NASA-JPL)
« Ce que nous avons à bord est essentiellement trois guillotines miniatures qui, lorsque le dispositif pyrotechnique est mis à feu, coupent les câbles et les tubes métalliques qui courent entre l’étage de croisière et la capsule d’entrée », déclare Luc Dubord, ingénieur en avionique pour MSL au JPL. « Ensuite un dispositif pyrotechnique de rétraction les écarte du chemin. Parallèlement, nous avons six écrous de séparation pyrotechniques qui, lorsqu’on les met à feu, accomplissent effectivement la séparation. »
Cent vingt-cinq millisecondes plus tard, deux autres dispositifs pyrotechniques sont mis à feu, libérant des ressorts comprimés qui larguent deux masses de 75 kilos de tungstène. Ce lest, déplaçant le centre de gravité, permet à la capsuled’effectuer la première entrée planétaire liftée de l’histoire (voir http://mars.jpl.nasa.gov/msl/mission/technology/insituexploration/edl/guidedentry/). Une douzaine de minutes et une rentrée atmosphérique« liftée » (et très chaude) plus tard, un autre ensemble de lests de tungstène, plus petit, est éjecté par procédé pyrotechnique pour réajuster le centre de gravité de l’atterrisseur en vue de l’approche finale de la surface. Quelques secondes après, le plus grand « bang » depuis que le satellite s’est détaché de sa fusée Atlas 254 jours auparavant, doit se faire entendre.
Descente sous parachute (doc. NASA-JPL)
Selon Dubord, « le parachute de MSL est le plus grand jamais utilisé pour une mission planétaire. Une fois replié et dans son conteneur, il est encore aussi gros qu’une poubelle. Nous devons le sortir de sa boite et le déployer à toute allure. La meilleure façon de le faire est de l’éloigner très vite du vaisseau spatial, dans son sillage, à l’aide d’un mortier.”
Pour y parvenir, les ingénieurs du JPL ont décidé que le mieux était d’utiliser une charge pyrotechnique équivalente à un bâton de TNT.
«Quand quelque chose comme ça part, ça fait beaucoup de bruit», déclare Dubord. « Bien sûr, à 14 kilomètres et un peu plus de Mach 1 au-dessus de Mars, je doute que quelqu’un sera là pour l’entendre. »
Bien que l’éjection du parachute soit le plus grand spectacle pyrotechnique de ce crucial EDL (« Entry, Descent, Landing »), ce n’est certainement pas le dernier. Le système d’atterrissage doit être libéré de la coque arrière qui l’a protégé lors de l’entrée dans l’atmosphère. Les moteurs de descente de la grue volante doivent être mis sous pression et le rover lui-même doit être libéré de la grue volante après qu’il soit descendu sous câbles sur la surface. Au total, il y a encore 44 explosions contrôlées qui doivent se produire exactement au bon moment (et pas à un autre) pour que Curiosity se pose en toute sécurité dans le Cratère Gale.
A 8 km d’altitude le bouclier thermique est largué alors que la sonde descend sous parachute. On voit le dessous du rover, roue repliées, et l’étage de descente est caché au dessus dans l’ensemble bouclier arrière. (Doc. NASA/JPL-Caltech)
Après largage du parachute, descente du rover Curiosity sous l’étage d’atterrissage qui freine avec ses moteurs fusée à hydrazine (doc. NASA-JPL)
« En excluant le mortier du parachute, la quantité de matériel « explosif » comprise dans tous les dispositifs pyrotechniques embarqués est seulement d’environ 50 à 60 grammes », déclare Webster. « C’est à peu près la même quantité de matières combustibles présentes dans l’air bag du volant de votre voiture. Quand vous faites le calcul, la quantité de matière explosive de chaque dispositif pyrotechnique n’est pas supérieure à celle d’une boîte d’allumettes. »
« Il est vrai qu’une boîte d’allumettes ne vous permettrait pas d’atterrir sur Mars …. la pyrotechnique, elle, le fera. » ajoute Webster.
Récapitulatif de la phase finale d’atterrissage (doc. NASA-JPL)
La mission MSL est dirigée par le JPL pour la Direction scientifiques de la NASA à Washington. Curiosity a été conçu, développé et assemblé au JPL. Caltech gère le JPL pour la NASA.
Vous pouvez voir une vidéo de l’EDL sur : http://www.nasa.gov/multimedia/videogallery/index.html?media_id=146903741. Cette vidéo qui décrit l’ensemble de la rentrée est intitulée à juste titre « Sept minutes de terreur » !