La totalité de la présentation d’Elon Musk sur son projet de système de transport spatial ou ITS pour Interplanetary Transportation System, effectuée le mardi 27 septembre lors dune séance plénière du 67 ème congrès d’astronautique, est disponible ici :
Pour l’assistance tout a commencé par une queue d’une heure et demie à la mesure de l’intérêt porté à cette conférence annoncée depuis de nombreux mois. Pour mémoire 4000 personnes assistent au congrès IAC 2016. (Doc. R. Heidmann)
C’est Jean-Yves Le Gall, président du CNES, au titre de sa présidence de l’IAF, la fédération internationale d’astronautique, qui a introduit cette session plénière de présentation de l’architecture de l’ITS.
L’assistance très nombreuse pour cet événement attendu depuis une année (doc. R. Heidmann)
Elon Musk lors de son intervention (doc. SpaceX)
Les corps du système solaire à l’échelle. Nous habitons la troisième planète. l’objectif immédiat est la 4 ème; mais cela sera la clé d’accès aux autres mondes du système solaire. L’homme peut -il devenir une espèce multiplanétaire ? C’est ce qu’il faut viser de démontrer dans les décennies qui viennent. (Doc. SpaceX)
Elon Musk explique assez rapidement qu’il faut viser un abaissement considérable des coûts de transport pour que celui -ci descende au niveau de celui de l’achat d’une maison sinon les deux sous ensembles de gens qui sont désireux de partir et de ceux qui peuvent se payer le voyage n’auraient pas d’intersection commune (doc SpaceX)
Les clés de la réduction des coûts selon SpaceX: la réutilisation à 100%, le ravitaillement en orbite terrestre, la production des ergols sur Mars et un bon choix de ceux-ci (doc. SpaceX)
La comparaison des ergols: kérosène /oxygène, hydrogène/oxygène et méthane/oxygène. Et le grand gagnant est …le méthane oxygène (doc SpaceX)
La présentation d’Elon Musk continue ensuite sur la vidéo descriptive d’une mission type de l’ITS. Celle ci est finalement très proche de la description qui en avait été faite par Richard Heidmann sur le site « Planète Mars ».
Le descriptif de l’architecture de mission: mise en orbite d’un 1er véhicule vide d’ergols que des mission successives viennent remplir. Le premier étage ou booster revient se poser au Kennedy Space Center avec une telle précision, qu’il atterrit sur le pas de tir en position pour le lancement suivant. C’est donc le même booster qui sert aux missions de ravitaillement du véhicule qui attend en orbite, les opérations ne demandant que quelques semaines. Les passagers (une centaine) peuvent déjà être à bord lors du premier vol. En haut à droite les taux de réutilisation des différents véhicules sont indiqués: 1000 pour le booster, 100 pour les tankers et 12 pour le vaisseau qui fait l’aller retour Terre Mars; l’atterrissage sur Mars se fait sans phase parachutes intermédiaire avec un important freinage en mode fusée, comme cela doit être prochainement démontré par une mission Red Dragon. (Doc. SpaceX)
Vue de la partie basse du booster avec ses 42 moteurs Raptors apparemment accrochés sur une structure de reprise de poussée plane, qui est aussi le fond du réservoir et est munie de renforts internes qui jouent aussi le rôle d’anti ballotants. Le gros tuyau central alimente les moteurs en oxygène liquide en provenance du réservoir supérieur. (Doc. SpaceX)
Une vue d’ensemble du lanceur: 12 m de diamètre en bas, 17 m de diamètre en haut avec es renflements latéraux (doc SpaceX)
Les structures en particulier les réservoirs cryo sont en fibres de carbone. Comme Falcon 9 le véhicule utilise de l’oxygène et de méthane liquide, densifiés par une température plus faible que celle d’équilibre à un bar (ergols sous refroidis). (Doc. SpaceX)
Comparaison des charges utiles et tailles de différents lanceurs. Le Mars Vehicle affiche 550 t en orbite basse (capacité à mettre l’ISS en orbite en un seul vol) contre 135 t pour la Saturn 5 lunaire (doc. SpaceX)
Comparaison plus fine entre la Saturn 5 et le Mars Vehicle (doc. SpaceX)
Le moteur Raptor utilisé en différentes versions de taux de détente sur l’ensemble du véhicule, conduisant à 310 t de poussée en version sol et 360 t en version vide . Full flow staged combustion signifie que tous les ergols passent dans les turbines avant d’être injectés dans la chambre de combustion. La turbine de la pompe oxygène est alimenté par la combustion d’un gros débit d’oxygène dans un petit débit de méthane. La turbine de la pompe méthane est alimentée par la combustion d’un gros débit de éthane dans un petit débit d’oxygène. Les deux flux de gaz qui sortent des turbines sont injectés ensuite dans la chambre principale pour une nouvelle combustion. Le Raptor a, à peu près la même taille que le Merlin et une poussée 3 fois plus grande car sa pression de combustion est 3 fois plus élevée. Cette pression est affichée à 300 b ce qui est un défi pour un moteur très fortement réutilisable. (Doc. SpaceX)
Un premier essai du moteur Raptor de 10 s a eu lieu le 26 septembre sur le banc tri cellules de SpaceX à Mc Gregor. La poussée obtenue sur ce premier essai n’a pas été précisée. (Doc. SpaceX)
Les caractéristiques du 1er étage. A une question ultérieure sur le lieu de construction de ce premier étage, Elon Musk répond que les éléments pourraient être construits à Michoud près de la Nouvelle Orléans, lieu où ont été construits les premiers étage de Saturn 5, le réservoir navette et maintenant les réservoirs du lanceur lourd NASASLS. Les éléments pourraient être transportés par bateau jusqu’au KSC et assemblés sur place. (doc SpaceX)
Une vue de l’arrière avec les 42 moteurs dont seuls les 7 centraux sont pilotables. Le 1er étage n’a pas de pieds mais 3 guides (ailettes latérales) et 3 structures en V pour revenir se positionner sur le pas de tir. (Doc. SpaceX)
Les caractéristiques du deuxième étage/vaisseau martien. les moteurs extérieurs à grand divergents sont utilisés pour les opérations sous vide comme l’élancement vers Mars. Les moteurs à divergent courts sont utilisés pour l’atterrissage sur Mars et sur la Terre. (Doc SpaceX)
La charge utile selon la vitesse à donner pour partir vers Mars. On voit que Space X vise de raccourcir la durée du voyage bien en dessous des 6 à 8 mois d’un voyage plus économique en ergols. (Doc. SpaceX)
Presqu’arrivé (doc. SpaceX)
La rentrée dans l’atmosphère martienne (doc. SpaceX)
La production des ergols oxygène et méthane à partir de l’eau et du gaz carbonique de l’atmosphère martienne. Au contraire du scénario Mars Direct qui prévoit d’apporter de l’hydrogène depuis la Terre pour faire réagir avec le gaz carbonique de l’atmosphère martienne, le projet SpaceX prévoit de partir intégralement de ressources disponibles sur place. (doc. SpaceX)
La question des coûts. SpaceX pense abaisser le coût de la tonne vers mars à 140 000 $. (Doc. SpaceX)
Et les sources budgétaire envisagées par Elon Musk pour un programme de développement qu’il évalue à 10 milliards de dollars. Actuellement seuls 5% des effectif de SpaceX travaillent sur le projet avec un rythme de dépenses de l’ordre de quelques dizaines de millions de $ par an. D’ici 2 ans après la fin du développement de Falcon (Falcon Heavy en particulier qui doit voler l’année prochaine) et Dragon (version vol habitée, Red Dragon pour Mars), Elon Musk espère passer à un rythme de dépenses annuelles d’environ 200 millions de dollars par an. Mais il espère un effet d’entraînement se traduisant in fine par un partenariat public privé. Pour l’instant SpaceX va faire avancer au mieux le projet avec les ressources disponibles et les supports extérieurs augmenteront progressivement. Il rappelle qu’il ne rassemble des ressources financières que dans cet objectif et pas pour son compte personnel. (Doc SpaceX)
Une notion de planning avec les premiers vols vers 2023 (doc SpaceX)
En attendant les vols de Red Dragon vers Mars doivent s’enchainer à partir de 2018 avec un vol tous les 24 mois lors des fenêtres de lancement vers Mars, avec pour objectifs: apprendre comment transporter de lourdes charges utiles vers Mars, identifier et caractériser les ressources potentielles telles que l’eau, caractériser les sites d’atterrissages potentiels et les risque de surface, démontrer des capacités clé d’opérations sur Mars . Pour Red Dragon Elon Musk anticipe une charge utile de l’ordre de 2 à 3 t. (Doc. SpaceX)
SpaceX a réalisé un impressionnant premier réservoir en composite carbone à la dimension du réservoir oxygène du vaisseau martien. Elon Musk reconnait que ces grands réservoirs cryogéniques sont l’un des points clé du projet. (doc. SpaceX)
L’intérieur du réservoir (doc. SpaceX)
L’intérieur du réservoir (doc. SpaceX)
Avec ce véhicule et une base martienne permettant le remplissage en ergols ce sont les destinations plus lointaines du système solaire qui deviennent accessibles à l’homme: Europa satellite de Jupiter (si l’environnement radiatif de Jupiter le permet). (Doc. SpaceX)
Le monde des satellites de Saturne s’ouvre également à l’homme (doc. SpaceX)
Par exemple Encelade (doc. SpaceX)
La présentation a ensuite été suivie d’une séance de questions réponses.
Interrogé sur sa vision des voyages interstellaires, Elon Musk a indiqué que pour lui cela passait par la maitrise de l’anti matière, mais qu’il faut d’abord maîtriser les transports dans le système solaire. Essayer d’imaginer un vaisseau interstellaire aujourd’hui ce serait comme essayer de faire un Boeing 747 avec la seule expérience du Flyer des frères Wright.
Elon Musk espère que sa présentation va aussi inciter d’autres initiatives dans le même domaine. Plus il y en aura et mieux ce sera.
« Serez-vous le 1er homme sur Mars ? »
« Probablement non »
Elon Musk insiste sur l’importance de donner aux futurs émigrants l’option possible du retour? De toute façon le vaisseau martien doit faire le voyage retour donc l’opportunité existe. Donner une option de retour permettra d’augmenter le nombre de candidats. Finalement ce sera probablement comme pour les européens qui partaient au Etats Unis. Beaucoup pensaient à terme revenir en Europe et peu ont exercé cette option.
Elon Musk a aussi rappelé qu’une fois sur Mars le problème ne sera pas l’approvisionnement en eau mais les sources d’énergie.
impressionant!! Bien que »Musk enthousiaste » je suis assez sceptique sur certains chiffres (1000 réutilisations du booster, delta V de TMI 6km/s ??!! quelle orbite de départ?)
J’adore qu’il garde le réservoir pour la fin!
….C’est vrai qu’on oublierait presque qu’il parle principalement d’allers simples
Comment créer des centaines de tonnes de carburant en des temps raisonnables pour repartir de Mars? C’est quand même fondamental non? Le vaisseau ressemble à la fusée de Tintin avec des pieds plus « petits » qd même. Avec une porte à 30 m du sol. Mais il faudra des gens pour mettre en place le système ISRU, faire les branchementes etc…Le premier équipage devra t-il tenir ce rôle lui-même pour espérer revenir sur Terre en héros, après avoir descendu par une grue les différents éléments de cette petite usine et l’avoir péniblement assemblée? Cela fait très SF soviétique des 60’s non? Ou bien y aura t’il en premier un ITS tanker automatique incorporant nativement un système de production de carburant? Et si oui comment se mettre à couple avec lui pour le transfert de carburant avec un vaisseau dépourvu de trains roulants? Bref autant d’aspects critiques sans réponses pour le moment. Quid des scaphandres? Mars est une planète où on ne PEUT PAS respirer. Imaginons de créer une société au fond de la Méditerrannée, des boulangeries, des crèches, des écoles, des usines, tout cela avec des bouteilles dans le dos…C’est chaud quand même non? Le scaphandre léger, durable, robuste, souple, confortable et standardisé, est une gageure. C’est déjà un énorme programme à lui tout seul et sans scaphandre pratique, pas de société sur Mars. Les gens feront quelques sorties puis resteront enfermés dans leur caravanes préssurisées. « Sortir dehors?! oh non…trop galère, on est déjà sorti la semaine dernière!… matons un film plutôt ». J’imagine que les réponses viendront en leur temps bien sûr mais je pensais que le projet aurait été un peu plus « travaillé » et argumenté même s’il y a plein de détails intéressants.