Communiqué de presse de la NASA n°2011/222 du 22 juillet 2011 (par Guy Webster du JPL & Dwayne Brown du siège de la NASA). Pasadena, Californie.
Voir http://mars.jpl.nasa.gov/news/whatsnew/index.cfm?FuseAction=ShowNews&NewsID=1141 (en anglais) et http://www.space.com/12394-nasa-mars-rover-landing-site-unveiled.html (en anglais également) qui présente une vidéo de survol rapproché du cratère Gale.
Traduction de Pierre Brisson
Le prochain rover de la NASA atterrira au pied d’une montagne résultant de l’accumulation de strates géologiques, à l’intérieur du Cratère Gale.
NASA PIA 14295 : Canyons dans la montagne du Cratère Gale (Doc.NASA/JPL-Caltech/ASU/UA)
Curiosity, le véhicule de la mission Mars Science Laboratory, doit être lancé tard cette année et atterrir en Août 2012. Le cratère cible a un diamètre de 154 kilomètres. En son centre s’élève une montagne plus haute que le Mont Rainier au-dessus de Seattle. Le cratère à une superficie égale au Connecticut et au Rhode Island réunis (NdT 18.000 km² soit trois départements français). La stratification de la montagne suggère qu’elle est le résultat d’une longue suite de dépôts. Le nom du cratère vient de celui de l’astronome australien Walter F. Gale.
«Nous avons fermement Mars en tête», a déclaré Charles Bolden, l’administrateur de la NASA. «Curiosity ne fera pas que nous envoyer une masse de données scientifiques importantes, il servira aussi en tant que mission précurseur de l’exploration de la planète rouge par l’homme.»
Dans la première partie de la mission qui durera une année martienne (près de deux ans terrestres), les chercheurs utiliseront les instruments du rover pour voir si la région de l’atterrissage a présenté des conditions environnementales favorables à une vie microbienne passée et à la préservation jusqu’à aujourd’hui des indices de cette vie.
Selon Jim Green, directeur de la Division des sciences planétaires au siège de la NASA à Washington, « Les scientifiques ont identifié Gale comme leur premier choix pour chercher à atteindre les objectifs ambitieux de cette nouvelle mission mobile de surface. Le site offre un paysage visuellement spectaculaire et également un fort potentiel pour des découvertes scientifiques significatives ».
En 2006, dans le cadre de réunions qui se sont tenues dans le monde entier, plus de 100 scientifiques ont commencé à étudier environ 30 sites potentiels d’atterrissage. Quatre candidats possibles ont été retenus en 2008. Une abondance d’images a permis une analyse approfondie de l’intérêt scientifique de chaque site et de la sécurité que chacun présentait. Une équipe de hauts responsables scientifiques de la NASA a ensuite effectué un examen détaillé et a unanimement convenu de suivre la recommandation de l’équipe scientifique du MSL. Cette équipe est composée d’une cohorte de chefs de projet et chercheurs associés.
Curiosity est environ deux fois plus long et plus de cinq fois plus lourd qu’aucun rover Martien précédent. Deux de ses 10 instruments scientifiques serviront à « l’ingestion » et à l’analyse d’échantillons de roches réduits en poudre que le bras robotique du rover collectera. Une source d’énergie radio-isotopique fournira du chauffage et de l’électricité au rover. Une grue maintenue en suspension par rétrofusées descendra directement Curiosity sur le sol martien en le retenant par des filins.
La région du cratère où Curiosity se posera, est un delta alluvial probablement formé par des sédiments apportés par l’eau. Les strates à la base de la montagne contiennent des argiles et des sulfates, deux roches connues pour se former dans l’eau.
Quelques caractéristiques géologiques de la région. L’orientation de l’image est à 180° par rapport à la première en tête d’article. L’ellipse d’atterrissage fait 20km/24km. Elle englobe un éventail alluvionnaire (« fan »). La zone d’argile figure en vert (« clays »). (doc. NASA/JPL-Caltech)
Selon John Grotzinger, responsable scientifique de la mission au California Institute of Technology (Caltech) de Pasadena : «un des caractères fascinants de Gale, c’est que c’est un énorme cratère situé à très basse altitude et nous savons tous que l’eau descend. En termes de coupe géologique verticale totale exposée et de basse altitude, Gale présente un attrait semblable à Valles Marineris, le plus grand canyon du système solaire ».
Curiosity ira au-delà de la stratégie d’exploration de « suivez l’eau » adoptée jusqu’à présent. La charge utile scientifique du rover peut identifier d’autres ingrédients de la vie tels que les éléments de construction biologique à base de carbone appelés composés organiques. La préservation sur le long terme des composés organiques exige des conditions spéciales. Parmi les minéraux que Curiosity peut trouver dans les couches riches en argile et en sulfate du bas de la montagne de Gale, certains sont susceptibles d’englober des composés organiques et de les protéger ainsi de l’oxydation.
« Gale nous offre des possibilités attrayantes de trouver des matières organiques, mais on n’y est pas encore », déclare Michael Meyer, scientifique en chef au siège de la NASA pour le « Programme Exploration de Mars. Ce qui augmente l’attrait de Gale c’est que, qu’il y ait ou non des matières organiques, le site contient une grande variété de caractéristiques et de strates géologiques qui devraient permettre d’étudier l’évolution des conditions environnementales de la planète dont certaines pourraient nous donner une plus large compréhension de l’habitabilité de l’ancienne Mars ».
Le rover et les autres composants du vaisseau spatial sont en cours d’assemblage et subissent les tests finals. La mission doit être lancée de Cap Canaveral entre le 25 novembre et le 18 décembre. C’est le JPL de la NASA (Pasadena) qui gère la mission pour la « Direction des missions scientifiques » de l’agence, à Washington. JPL est une division de Caltech.
Commentaire :
Bien que l’envoi d’une mission robotique ne présente évidemment pas l’intérêt qu’aurait le lancement d’une mission d’exploration par vol habité, nous ne devons pas bouder notre plaisir. Curiosity est une superbe machine beaucoup plus puissante et habile que nos deux « amis » Opportunity et Spirit ; le lieu d’atterrissage choisi est effectivement un site extrêmement riche sur le plan géologique. De nombreux spécialistes immédiatement interrogés par Space.com juste après l’annonce du choix de la NASA, ont d’ailleurs tous exprimé leur satisfaction.
Espérons maintenant que le décollage se passe bien, que l’EDL (Entry Descent Landing ou entrée, descente et atterrissage) se déroule bien en dépit de la nature assez délicate du site choisi (coincé entre la montagne et le bord du cratère), de la masse très importante de Curiosity et de la technique d’atterrissage très originale qui sera utilisée, enfin que, une fois au sol, les divers instruments forcément délicats (en dépit de leur « robustesse ») embarqués à bord du rover, fonctionnent bien. L’expérience a mis en évidence toute la difficulté de la réussite de telles missions robotiques. Même si la NASA est de plus en plus « rodée », il va y avoir du « suspense » !
Un article (en anglais) avec une video qui reconstitue une vue oblique du site: c’est la vue qui s’offrira à Curiosity une fois au sol… http://www.space.com/12394-nasa-mars-rover-landing-site-unveiled.html
Mission prometteuse. Oui, on ne peut que espérer que tout se passe bien. La méthode pour l’atterrissage est pour le moins spectaculaire mais elle doit encore faire ses preuves dans un environnement martien. Dans le contexte actuel de marasme un échec de cette mission serait extrêmement dommageable pour l’avenir de l’exploration.