Article de Robert Zubrin publié dans le Washington Times du 24 août 2011.
La NASA sur le billot
Par Robert Zubrin
Traduction de Pierre Brisson
Le programme de vols habités de la NASA est à la dérive. La Navette Spatiale a fait son dernier vol et l’administration Obama n’a pas de plan cohérent pour la suite. Au lieu de cela elle a proposé que les Etats Unis dissipent les 100 milliards de dépenses budgétés pour la décennie prochaine, dans le soutien d’un programme de vols habités qui ne va nulle part et n’accomplit rien.
En face d’une exigence de plus en plus impérative de réduire le déficit fédéral, ce manque de plan cohérent présente le programme spatial du pays à la hache du bourreau.
Si l’on veut que l’effort fait par les Etats Unis pour leur programme spatial soit défendable, il faut un but qui soit concret et qui vaille la peine d’être poursuivi. Ce but doit être d’envoyer des hommes sur Mars.
Grâce à une série de sondes envoyées avec succès sur et autour de la planète rouge au cours de ces 15 dernières années, nous savons avec certitude que Mars fut autrefois une planète chaude et humide et qu’elle a continué à avoir une hydrosphère active pendant une période de l’ordre du milliard d’années (une durée cinq fois plus longue que celle qui a été nécessaire pour que la Vie apparaisse sur la Terre après qu’il y ait eu de l’eau liquide). De nouvelles constatations publiées par la NASA la semaine dernière indiquent que de l’eau du sous-sol remonte périodiquement jusqu’en surface de la planète. Ainsi, s’il est vrai, comme on peut le théoriser, que la vie est un phénomène naturel émergeant de la chimie partout où il y a de l’eau liquide, certains minéraux et une période de temps suffisamment longue, la vie a pu apparaitre sur Mars et elle peut s’y trouver encore.
Si nous allons sur Mars et trouvons les fossiles d’une vie passée à sa surface, nous aurons de bonnes raisons de penser que nous ne sommes pas seuls dans l’Univers. Si nous y envoyons des explorateurs humains capables de monter des tours de forage susceptibles d’atteindre l’eau souterraine où la vie martienne pourrait bien persister, nous serons en mesure de l’examiner. En le faisant nous pourrons déterminer si la vie sur Terre suit un modèle universel ou bien si, alternativement, nous sommes simplement un exemple ésotérique d’une tapisserie beaucoup plus vaste et plus intéressante. Ca vaut vraiment la peine de le savoir.
De plus, Mars est un défi que notre société a besoin d’affronter. Les nations comme les gens prospèrent sur les défis et dépérissent quand ils en manquent. Un programme de missions habitées sur Mars serait une invitation à l’aventure lancée à tous les jeunes de ce pays. Il enverrait ce message puissant : « Suivez les enseignements scientifiques et vous pourrez compter parmi les pionniers d’un monde nouveau ». En relevant un tel défi, nous obtiendrions en retour des millions de jeunes scientifiques, ingénieurs, inventeurs et chercheurs en médecine qui réaliseraient des innovations technologiques qui à leur tour permettraient de créer de nouvelles industries, de trouver de nouveaux traitements, de renforcer la défense nationale et d’augmenter le revenu national à une échelle qui ferait totalement oublier les dépenses d’un programme martien.
Mais la raison la plus importante pour aller sur Mars est la porte que cela ouvrirait vers le futur. Seule parmi les corps du système solaire interne, Mars est dotée de toutes les ressources nécessaires pour permettre non seulement le support de la vie mais aussi le développement d’une civilisation technologique. Pour notre génération et celles qui suivront, Mars est le Nouveau Monde. Nous ne devons pas rejeter son défi.
Nous sommes prêts. Bien qu’elle soit plus éloignée, nous sommes beaucoup mieux préparés aujourd’hui pour envoyer des hommes sur Mars que nous l’étions pour envoyer des hommes sur la Lune en 1961 lorsque le président Kennedy lança le programme Apollo (et nous étions sur la Lune huit ans plus tard). Contrairement à ceux qui cherchent sans cesse à différer tout engagement, les vaisseaux spatiaux de science fiction ne sont pas nécessaires pour aller sur Mars. L’exigence principale est un lanceur lourd d’une capacité similaire à celle du lanceur Saturn V utilisé dans les années 1960. C’est quelque chose que nous savons parfaitement construire. Le problème n’est pas l’argent, le problème c’est le leadership. Le budget moyen de la NASA pendant l’ère Apollo (1961-1973), ajusté par l’inflation, était d’environ 19 milliards par an en dollars d’aujourd’hui, seulement 5% de plus que le budget d’aujourd’hui. Pourtant la NASA des années 1960 a réalisé 100 fois plus, parce qu’elle avait une mission avec une date butoir et qu’elle était forcée d’élaborer un plan efficace pour accomplir cette mission. Si on donnait aujourd’hui à la NASA ce genre d’instructions, nous pourrions avoir des hommes sur Mars d’ici une décennie. Si non (ou sinon ?), en laissant l’Agence dépourvue de gouvernail dériver dans le tsunami financier qui arrive, on pourrait bientôt se retrouver sans aucun programme de vols spatiaux habités.
Certains peuvent dire, pourquoi ne pas simplement le laisser couler ? N’y a-t-il pas des choses plus vitales à sauver du naufrage budgétaire ? De telles pensées cependant seraient erronées. La catastrophe financière du gouvernement n’a pas été causée par la NASA mais par une administration qui n’y porte aucun intérêt. L’acceptation de la destruction du programme spatial revient simplement à l’acceptation du déclin de l’Amérique. Avec tous ses défauts, la NASA est l’une des gloires de notre époque. Les Etats Unis constituent 4 pour cent de la population mondiale et ils ont cependant fourni 100% des personnes qui ont marché sur la Lune, 100% des rovers qui ont roulé sur Mars et 100% de sondes qui ont visité Jupiter, Saturne, Uranus ou Neptune. On se rappellera notre époque parce que ce sera celle où, pour la première fois, l’humanité aura hissé les voiles pour d’autres mondes. On se souviendra de notre nation comme celle qui aura ouvert la voie.
http://www.washingtontimes.com/news/2011/aug/24/nasa-on-the-block/
Cet appel est pathétique. Quel retournement de situation en l’espace de quelques mois! Il est déjà loin le temps où les Etats-Unis affichaient des ambitions grandioses. Certains veulent encore croire à une crise passagère mais les conditions pour relancer le programme spatial sont tellement multiples et contraignantes qu’on peut se demander si elles seront un jour réunies. Après toutes ces décennies perdues, on peut se demander si nous n’avons pas mangé notre pain blanc. Demain risque d’être encore plus difficile. Un mot tabou me vient à l’esprit: DÉCLIN.
Il est pitoyable que ce type de lettre ouverte n’ait pas été relayée par la presse internationale.Plus de navette,un programme spatial déliquescent, où est donc l’esprit pionnier de l’Amérique? En tout cas, merci Robert Zubrin!
Si on laisse les politiques et militaires de la planère Terre trouver un consensus : on peut toujours attendre.Si on accorde plus de liberté au secteur privé: on peut voir 2 couples sur Mars d’ici seulement une décennie, pourquoi se voiler la face?Certains humains voudrait-ils conserver leur frères et soeurs en prison sur Terre?