Des planétologues du Caltech ont récemment mis en évidence des changements climatiques passés sur Mars, causés par un phénomène exogène à la planète : un phénomène astronomique. Il s'agit cette fois du changement d'inclinaison de l'axe de rotation de la planète, également appelé obliquité, changement qui s'est régulièrement opéré sur Mars, à des vitesses et dans des proportions très importantes…
C'est d'après des données très précises obtenues par la caméra de la sonde MRO, que les scientifiques ont pu étudier en détails des couches géologiques sédimentaires de la région d'Arabia Terra. A l'intérieur de quatre cratères d'impact notamment, ces couches géologiques affleurantes, véritables mille feuilles, présentent une régularité étonnante. Grâce à MRO, on y discerne des couches entre 1 et 10 mètres d'épaisseur, toujours très régulières y compris dans leur albédo…
Les planétologues ont pris comme référence les couches stratifées du cratère Becquerel puis ont postulé que chaque couche géologique s'est formée sur une période de plus de 100.00 ans, par le même cycle climatique. De plus, ils ont regroupé par groupe de 10, l'ensemble des couches en unités supérieures d'une valeur d'environ 1 million d'année. Dans le cratère Becquerel, les séquences de 10 couches se répètent au moins 10 fois…
Sur Terre, la variation de l'inclinaison de l'axe de rotation varie entre 22,1° et 24,5° sur une période de 41.000 ans, la Lune étant un élément stabilisateur très fort. Mais cette très faible amplitude suffit a générer des variations saisonnières différemment marquées et donc parfois des âges glaciaires très significatifs… les régions éclairées par le Soleil ainsi que les conditions de cet éclairement, variant au fil du temps et durant l'année. Ainsi, des changements climatiques s'opèrent et prennent empreintes jusque dans les paysages.
Sur Mars, la variation se fait plus brutale : c'est par dizaines de degrés que l'axe d'inclinaison change, sur des périodes cycliques de 100.000 ans, ce qui produit des changements climatiques catastrophiques.
Quant l'obliquité est faible, les pôles sont les lieux les plus froids de la planète tandis que le Soleil est toujours au plus près de l'équateur. Cette situation pourrait avoir comme effet la production importante d'éléments volatils dans l'atmosphère du fait de transferts plus nombreux entre les stocks équatoriaux et les stocks polaires…
Quant l'obliquité est forte, les pôles reçoivent relativement plus de lumière du Soleil, ce qui entraîne de nouveaux transferts des pôles vers l'équateur cette fois.
Ainsi, quant le CO2 se transfert depuis les pôles, la pression atmosphérique globale augmente, affectant l'ensemble des processus du climat, de l'efficacité des vents à éroder, transporter et déposer du matériel jusqu'aux températures atmosphériques, voire aux dépôts solides de givre et de neige… Les paysages s'en trouvent affectés sous les nouvelles conditions morpho-climatiques créées. Les taux de dépôts des sédiments varient alors de la situation précédente : le paysage change.
De même, si avant un changement d'inclinaison majeure, l'eau en phase liquide est impossible à la surface, certaines nouvelles situations peuvent produire de vastes débacles et inondations durant la nouvelle période. A l'inverse, à la période de refroidissement suivante, les stocks d'eau liquide vont figer et créer des glaciers… voire disparaître totalement. Ainsi quand l'eau peut être liquide en surface, l'altération des paysages par des processus physiques mais aussi chimique est totalement différente de la situation précédente. Les dépôts sédimentaires changent également de caractéristiques et de formes.
Ce sont toutes ces conditions morpho-climatiques qui changent et évoluent au fil du temps et qu'il conviendra d'étudier avec précision pour retracer la grande histoire astronomique, géologique, géomorphologique et climatique de Mars et peut-être avec, celle des conditions d'une vie potentielle passée.
© Texte : Gilles Dawidowicz/APM.
© Images : Topography, Caltech; HiRISE Images, NASA/JPL/University of Arizona).