A bord de l’ISS se trouvait depuis plusieurs années un occupant très particulier, en fait un mannequin destiné à l’étude fine des radiations, simulant la position des organes de notre corps et la nature des tissus les entourant. Ce paisible passager, réduit à un torse de 84 cm de haut, était truffé de pas moins de 1634 capteurs permettant de caractériser la nature et l’énergie des rayonnements réellement reçus par chacun de nos organes les plus sensibles. L’expérience, nommée Matroshka, basée sur des technologies américaines, était mise en œuvre par des équipes russes, japonaises et européennes. Elle s’est déroulée en 4 phases, depuis 2004. Ses résultats ont été publiés récemment (Radiation and Environmental Biophysics).
Ils sont très réconfortants ! Après les premières mesures de l’ambiance radiative à la surface de Mars, qui montraient que celle-ci était comparable, en ordre de grandeur, à celle régnant au niveau de l’ISS, ces résultats permettent en effet, d’une façon plus globale, de revoir à la baisse les risques encourus par les futurs explorateurs. En effet, l’étude montre que le rôle protecteur des tissus vivants entourant ces organes critiques a été notoirement sous-estimé : « les dosimètres individuels (portés dans une poche ou sur la poitrine) surestiment considérablement la dose reçue, jusqu’à 3 fois dans le pire des cas [en extérieur] ». Le corps humain est donc plus efficace que ce que l’on croyait en tant que bouclier.
Naturellement, même si elle respecte les normes sanitaires établies pour l’ISS (moyennant la disposition d’un refuge contre les « Solar Particle Events »), la dose totale pour l’expédition type de 30 mois vers Mars reste importante, et tout doit être fait pour la limiter ou en limiter les effets. Mais d’ores et déjà on peut considérer que ce risque spécifique est acceptable dans le cadre d’un premier programme martien, où les risques d’origine technique ou résultant de la nature même du contexte d’exploration seront prédominants.
Par contre, lorsqu’il s’agira de faire voyager les équipes de futures stations scientifiques permanentes, voire des volontaires pour la fondation d’un établissement humain… des solutions plus radicales devront avoir vu le jour (réduction du temps de trajet, protection magnétique, matériaux écran innovants, dopage de l’appareil de défense biologique…). De telles solutions sont déjà à l’étude ; chaque chose en son temps.
(photo ESA)