A l’occasion de l’arrivée de Curiosity sur Mars, le NASA JPL avait, comme à l’accoutumée dans ce genre de circonstances, très bien organisé l’accueil des médias, américains et étrangers, sur son site de Pasadena. Un auditorium de plusieurs dizaines de places, dans lequel trônaient les maquettes grandeur nature des sondes Voyager et Mars Reconnaissance Orbiter, et à échelle un demi de la sonde Cassini, était à disposition des journalistes. En attendant l’heure H de l’entrée atmosphérique prévue vers 22H30 heure locale (Pacific Time), quelques vedettes vinrent déclarer leur passion pour la conquête spatiale et répondre aux questions des journalistes américains, toujours avides d’interroger des célébrités. Parmi eux l’astronaute Leland Melvin, administrateur associé de la NASA pour l’Education, accompagné de Will Smith (un des deux acteurs principaux de la série Men in Black) remportèrent un franc succès.
Un écran géant situé au fond de l’auditorium montrait une simulation informatique de l’approche de la sonde avec visualisation de Curiosity et de Mars et affichage en temps réel des paramètres principaux : vitesse, distance, altitude, temps restant avant l’entrée atmosphérique, temps restant avant l’atterrissage, etc. Le même écran retransmettait en direct, et à tour de rôle, les événements survenant dans la salle de communication principale (black room) et la salle réservée à la phase de descente (critical events room). La descente peut être effectivement considérée comme un événement critique !
Les spécialistes de mission nous avaient tant détaillé toutes les étapes et les dangers potentiels des « sept minutes de terreur » de la phase EDL (Entry, Descent and Landing) que les sept minutes réelles passèrent finalement très vite, d’autant plus vite que tout se déroula dans des conditions nominales. Pas le moindre accroc.
Le responsable de la navigation Allen Chen annonça le début des opérations depuis la salle « critique » « Nous avons coupé le transmetteur à destination de la sonde » (pour éviter d’interférer accidentellement avec sa séquence automatique d’arrivée). « We are right on target, c’est parti ! »
Pas de télémétrie proprement dite pendant la descente. Mais chaque événement était annoncé par un « happy tone », tonalité caractéristique qui annonce le bon déroulement d’une tâche précise, séparation du vaisseau, entrée atmosphérique, décélération maximale, ouverture du parachute supersonique, largage du bouclier thermique, séparation du backshell, début du mode de descente propulsée, passage en mode skycrane, etc. La succession des tonalités qui confirmait que la descente se déroulait comme prévu déchaînait à chaque fois un concert de hurlements et d’applaudissements, plus nourri et bruyant au fur et à mesure du bon déroulement de l’opération.
L’apothéose fut la confirmation de l’atterrissage par le dernier bip, suivi très vite par une triomphale photographie prise par la « hazcam » de Curiosity : une image en noir et blanc qui montrait l’ombre du rover sur la surface martienne. On reconnaissait la silhouette caractéristique de l’engin, le dernier doute était levé, Curiosity était bien posée. L’événement fut salué par un tonnerre d’applaudissements et de cris d’enthousiasme.
Reste à confirmer la position exacte du rover. Un atterrissage près de la partie Nord de l’ellipse d’incertitude serait une excellente nouvelle car elle ferait gagner à Curiosity des jours, voire des semaines, dans son périple pour atteindre la base du mont Sharp, son principal objectif. A suivre aux prochains passages des orbiteurs Odyssey et MRO.
Moins d’une heure après l’arrivée une tribune officielle dressée sous l’écran principal accueillait officiels et gradés de la NASA et du JPL. Discours enthousiastes de Charles Bolden, administrateur en chef de la NASA, John Holdren, conseiller scientifique du président Obama, qui s’est sans doute fait violence pour annoncer à cette occasion que les missions martiennes étaient une priorité de l’administration !, John Grunsfeld, directeur scientifique et « associate administrator » de la NASA, Charles Elachi, directeur du JPL, Peter Theisinger, chef du projet Curiosity, Richard Cook, chef de projet adjoint, Adam Steltzner, responsable de la phase EDL et John Grotzinger, responsable scientifique du projet.
Au premier plan à droite, Etienne Martinache et Richard Heidmann dans l’auditorium du jet Propulsion Laboratory. (doc. NASA)
Avant tout, hommage à l’équipe qui gagne ! « EDL, EDL, EDL ! » scandèrent les chefs de projet avant même de prendre la parole. Plusieurs dizaines de techniciens chargés de la phase Entrée, Descente et Atterrissage firent alors le tour de l’auditorium sous une ovation générale.
Heure officielle de l’atterrissage, selon Adam Steltzner, volubile et flegmatique manager de l’EDL au look à la Elvis Presley : 10H 14mn 39s. Vitesse à l’atterrissage 0,738 m/s. Ne restent dans ses réservoirs que 140 litres de propergol sur les 400 litres initiaux. Petit commentaire malicieux d’Adam à ses collègues de l’équipe de conception du rover. »J’ai bataillé ferme pour augmenter la taille de ces réservoirs. Quelque chose me dit que j’ai eu raison, pas vrai Joe ? » lança-t-il à un de ses collègues. Eclat de rires général
Une excellente nouvelle pour l’exploration martienne. Une grande aventure scientifique commence.
Prochaine étape, la mise en service progressive du rover. A suivre …
Merci pour ces infos !!
Je me suis levé de bonne heure pour regarder NASA TV. Quelle réussite extraordinaire, quels trésors d’ingéniosité et de complexité déployés. On peut citer par exemples les 72 charges pyrotechniques mises en jeu dont l’allumage était réglé à la milliseconde près,l’orientation de la capsule par des masselottes pour ralentir la descente selon le principe du freesby et puis la confirmation de l’atterrissage et la première image.J’ai donc débouché le champagne à 7h et demi du matin avec les petits gâteaux (pour récompenser ma curiosité…..)